-
Drive de Nicolas Winding Refn
___________________________________________________________
Drive
de Nicolas Winding Refn
USA – (2011) – Thriller / Drame
___________________________________________________________
Après le magnifique mais très hermétique Valhalla rising, le guerrier silencieux le réalisateur danois Nicolas Winding Refn signe avec Drive son film sans doute le plus accessible. Récompensé fort justement au dernier festival de Cannes du prix de la mise en scène Drive est sur le papier une histoire assez classique de gangster mais transcendée par la réalisation de Refn qui parvient à y glisser ses obsessions et son univers.
Drive raconte l'histoire d'un pilote de voiture solitaire et peu loquace qui exerce ses talents de cascadeur pour Hollywood le jour et met ses dons de pilote aux services des malfrats la nuit. Avec un sérieux code de conduite ce driver ne prend jamais directement part aux cambriolage et se contente de servir de chauffeur. Son univers détaché va basculer suite à la rencontre de sa jeune voisine Irene et de son fils, le driver se retrouve alors impliqué personnellement dans une affaire qui le dépasse mais dans laquelle il va se plonger pour tenter de sauver celle qu'il aime.
Le scénario de Drive, qui n'est pas signé Nicolas Winding Refn mais Hossein Amini, n'est donc pas d'une grande originalité puisque on y retrouves le classique schéma mainte fois utilisé du héros taciturne et solitaire qui par amour se retrouve plonger dans une histoire de maffia et de gangsters. L'histoire n'est donc objectivement pas le point fort de Drive qui dans les mains d'un réalisateur lambda n'aurait sans doute jamais dépassé le stade du gentil polar de série B. Mais voilà derrière la caméra de Nicolas Winding Refn Drive devient un objet de fascination dans lequel le réalisateur parvient à insuffler son univers, ses obsessions en livrant un film qui prend souvent à contre pied les attentes du spectateur pour transformer un polar des plus banal en un très grand film. Le héros du film devient de ce fait une figure qui s'inscrit parfaitement dans l'univers de son réalisateur avec un personnage peu bavard, apparemment inexpressif et capable de débordements de violences bien sèche. Ryan Gosling un poil trop mono-expresif ne possède aucunement le charisme de malade d'un Mads Mikelsen mais le jeune acteur livre une belle performance dans laquelle l'intégralité des émotions semblent bouillir à l'intérieur du personnage sans parvenir à s'exprimer. A ses cotés il faut saluer la charmante performance de Carey Mulligan et une belle galerie de seconds rôles avec Ron Perlman, Albert Brooks, Oscar Isaac et surtout l'immense Bryan Cranston (Breaking bad).
Drive est tout simplement un film qui démontre à quel point l'élément primordial à la réussite d'un film reste la puissance de sa mise en cène. Nicolas Winding Refn ne cède jamais à la facilité, préfère orchestrer des courses poursuites comme de fascinant jeux du chat et de la souris plutôt que de tomber dans la surenchère d'explosions et de cascades, joue sur l'ambiguïté d'un curieux triangle amoureux pour livrer une histoire d'amour platonique basée avant toute choses sur le respect et offre aux spectateurs à intervalle régulier de formidables moments de cinéma. L'attaque de la chambre du motel, la confrontation finale filmée quasiment uniquement à travers des ombres sur le sol et la formidable scène romantico-barbare de l'ascenseur restant quelques uns des point d'orgue du film. On pourrait encore ajouter aux nombreuses qualités du film les accents à la Michael Mann avec la manière dont Refn filme la nuit et la fascinante musique de Cliff Martinez avec de morceaux signés Kavinsky, The cromatics ou Desire. A la manière de son héros Drive impose ses règles et sa mécanique à la fois lente et implacable débouchant sur un final qui semble encore hésiter entre le happy end et la figure mélancolique du héros solitaire.
Drive est au bout du compte un pur objet de fascination à la fois fulgurant et contemplatif qui mélange dans un même écrin les obsessions formelles de son réalisateur avec les univers des films noirs de Mann à Friedkin en passant par Scorsese.
Ma note: 08,5/10
-
Commentaires