• Millenium de David Fincher

     

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    Millenium, Les hommes qui n'aimaient pas les femmes

    (The girl with the dragon tatoo)

    de David Fincher

    USA/Suède/Allemagne (2012) – Thriller / Suspens Ikea

    Millenium de David Fincher

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    A peine deux ans après le Millenium de Niels Arden Oplev, Hollywood s'empare comme souvent du phénomène et met en chantier un énième remake aux couleurs presque locales. La petite différence avec ce type de projet généralement assez douteux reste la présence de l'un des meilleurs réalisateurs actuellement en exercice à la barre du projet en la personne de David Fincher. Il convient aussi de ne pas oublier le fait que avant d'être un film Millenium reste un roman pouvant inspirer plusieurs adaptations. Impossible toutefois de totalement oublier le film de Niels Arden Oplev et de ne pas se laisser tenter par le petit jeu de la comparaison avec le film de Fincher ....

    Millenium c'est l'histoire de Mikael Blomkvist un journaliste mis sur la touche à la suite d'un procès en diffamation perdu. L'homme accepte alors d'enquêter pour le compte d'un riche industrielle sur la mystérieuse disparition de sa nièce survenue presque quarante ans plus tôt. Mikael engage alors comme assistante une jeune femme marginale et rebelle mais véritable crack en informatique dont l'esprit d'analyse et de synthèse dépasse l'ordinaire. Ensemble ils vont tenter de mettre à jour une vérité enfouit depuis près d'un demi siècle...

    Millenium de David Fincher

    La première chose absolument évidente qui saute aux yeux à la vision de ce nouveau Millenium c'est la qualité de mise en scène de David Fincher qui enfonce sans trop forcer l'esthétique télévisuelle et le rythme assez mou du film de Niels Arden Oplev. L'enquête dont nous connaissons déjà pourtant l'issu et la mécanique redevient assez passionnante sous la caméra de Fincher qui donne au récit une densité et un suspens qui objectivement faisait parfois défaut au film suédois. Un sacré paradoxe donc et un sacré tour de force aussi de la part de Fincher de rendre presque plus intéressant que dans le film d'origine un récit dont on connait pourtant déjà la fin. David Fincher installe un véritable climat de tension et de malaise parfaitement soutenu par un formidable sound design et la musique monstrueusement stressante de Trent Renzor (Lost Highway) et Atticus Ross. Le simple bruit d'un courant d'air dans l'immense maison froide et désincarné de Martin Vanger devient par exemple une source de malaise et d'inconfort. David Fincher a également l'excellente idée de ne pas délocaliser l'action et de garder ainsi le rythme sec et un peu engourdit par le froid de l'intrigue. On pouvait pourtant craindre le pire après un générique de début, certes absolument magnifique, mais un poil à coté de la plaque dans son esthétique trop tape à l'œil entre clip et publicité. Si le Millenium original semble fatalement beaucoup plus ancrée dans une esthétique et un rythme typiquement nordique, le film de Fincher a le très bon goût de ne jamais céder à une surenchère d'effets devenus les marques de fabrique systématique des thriller et psychokiller américains. David Fincher dans une mise en images finalement assez classique parvient à donner à cette enquête toute l'intensité dont elle a besoin. Le réalisateur de Seven et Fight Club nous livre toutefois deux trois moments de purs mise en scènes aux images particulièrement marquante comme la vengeance sauvage de Lisbeth ou la poursuite finale.

    Millenium de David Fincher

    Au niveau du casting le film opère quasiment un sans fautes confirmant que Fincher est autant un formidable directeur d'acteurs qu'un faiseur d'images. Daniel Craig incarne un Mikael Blomkvist vraiment charismatique, charmeur et pugnace qui parvient sans peine à faire oublier le pourtant formidable Michael Nyqvist de la version originale. Les seconds rôles sont tout aussi convaincant même si l'identification aux personnages étaient plus facile dans la version suédoise du fait de visages souvent bien moins connus que ceux de Christopher plummer, Robin Wright ou Stellan Skarsgard. Il reste ensuite le cas Rooney Mara qui incarne en toute objectivité une formidable Lisbeth Salander mais qui pour moi ne parvient jamais à faire totalement oublier l'extraordinaire présence de Noomi Rapace dans le film de Oplev. C'est peut être le simple fait d'avoir associer en tout premier le physique et le visage du personnage à celui de la comédienne suédoise mais pour moi Lisbeth reste Noomi Rapace. J'aime l'aspect plus monolithique et abrupt de la Lisbeth du film original et bien moins la fragilité sous la carapace de la femme amoureuse de Blomkvist dans le film de Fincher. Encore une fois cela n'entame en rien les qualités de Rooney Mara et la force de son interprétation mais ma préférence va incontestablement vers le charisme naturel de Noomi Rapace.

    Millenium de David Fincher

    Pour le reste le Millenium de Fincher comporte pour moi les mêmes qualités et les mêmes défauts que celui de Niels Aden Oplev avec essentiellement cette fin à rallonge qui n'en finit plus de finir. Pour moi le film se termine assez clairement après la résolution complète de l'enquête et la transformation de Lisbeth en super agent secret détournant des fonds pour sauver la réputation de journaliste de Blomkvist me laisse totalement de marbre pour ne pas dire plus. J'ai également une sensation, bien plus qu'une véritable certitude, que le film de Oplev possédait une ambiance un peu plus trouble et glauque que dans le film de Fincher notamment lors de la visite au vieux nazi de la famille. Assez bizarrement je trouves également que l'affrontement finale entre Blomkvist et le tueur était plus intense dans le film suédois, c'est étrange mais la galerie d'outil oranges accrochés au mur façon Hostel et l'utilisation incongrue du Orinoco flow de Enya m'ont fait bien plus sourire que frissonner.

    Au final Millenium est incontestablement un très bon film et un excellent remake qui par la simple intensité de la mise en scène de Fincher permet de dépasser un poil son modèle suédois. Après l'écart reste pour moi suffisamment mince pour ne pas faire du film de Fincher une référence absolue. Le fait d'avoir découvert les personnages et l'intrigue dans le contexte strictement suédois du film de Niels Aden Oplev a sans doute un peu biaiser mon regard sur le film de Fincher et puis c'est toujours difficile de totalement adhérer à un thriller dont on connait déjà toute la construction et la fin. Si j'osais, je dirais presque que ce Millenium n'est qu'un bon remake inutile de plus....

     

    Les notes:

    Millenium version Niels Aden Oplev 07/10

    Millenium version David Fincher 08/10

     

     

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 10 Février 2012 à 22:58

    "Si j'osais, je dirais presque que ce Millenium n'est qu'un bon remake inutile de plus...."

    Bla bla bla !

    Tu dis ça parce que tu n'as pas lu le livre... Parce que déjà en tant que long-métrage indépendant le film de Fincher enfonce assez facilement la version suédoise, mais en tant qu'adaptation fidèle du bouquin, c'est encore pire. Les personnages secondaires ne sont plus sacrifiés (notamment celui de la rédactrice en chef), Michael Blomkvist retrouve enfin le charisme qui lui faisait totalement défaut sous les traits du transparent Michael Nyqvist, et surtout Lisbeth redevient un personnage à plusieurs dimensions, et pas seulement une rebelle qui fait la gueule. Je peux (presque) comprendre que la Lisbeth amoureuse te dérange, mais c'est pour moi justement le coeur du personnage: une fille en apparence totalement antisociale mais qui au final a besoin comme tout le monde de quelqu'un à qui faire confiance (ce qui ne l'empêche pas d'être forte et indépendante). Et puis sans cette histoire d'amour impossible, difficile de préparer la suite de l'histoire, vu qu'un certain nombre d'événements vont découler du renfermement de Lisbeth sur elle-même suite à la trahison involontaire de Blomkvist.

    Bref, je comprends tes quelques réserves (encore qu'elles me semblent plus relever de la mauvaise foi qu'autre chose), mais pour moi cette nouvelle adaptation (désolé mais dans ce cas-là ce n'est pas vraiment un remake) est salvatrice et était définitivement nécessaire, vu la mollesse du film suédois.

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    2
    FreddyK
    Samedi 11 Février 2012 à 01:05

    C'est clair que je n'ai pas lu le livre et d'ailleurs je ne juge aucunement des qualités d'adaptation de ce dernier dans ma critique.... C'est une différence majeure de nos deux points de vues dont tu dois tenir compte avant de me sortir l'argument de la mauvaise foi qui n'est pas mon mode de penser prioritaire au moment de rédiger une critique. Même si visiblement cette dernière te déplait (ce que je comprends totalement), cette critique et cette analyse toute personnelle (je n'ai jamais eu la prétention de donner autre chose que mon opinion) est la plus sincère possible sur mon ressenti vis à vis d'un film que je juge avec mes référents et mes sentiments. S'il te plait ne me dégaine pas l'argument passe partout de la prétendue mauvaise foi pour un simple différent d'opinion.

    Oui le film de Fincher est incontestablement supérieur au film de Oplev mais je n'ai objectivement pas beaucoup plus accroché à cette version qu'à la précédente. Concernant Lisebeth je confirme sans soucis (et sans mauvaise foi ) ma préférence pour Noomi Rapace. Le coté rebelle avec un petit coeur fragile qui bat à l'intérieur ne me touche pas vraiment, en tout cas bien moins que la force d'un personnage féminin monstrueusement fort et droit dans ses bottes comme dans la version suédoise.

    Je te sens un peu énervé l'ami Geouf, attends de lire ma critique de Sherlock 2 pour te lâcher (non je deconnes )

     

    3
    Samedi 11 Février 2012 à 16:53

    Je t'assure que je ne suis pas énervé.

    C'est juste que le ton de ta critique m'a un peu surpris. En gros j'ai eu l'impression que sur les 2/3 de la critique tu montrais à quel point le film de Fincher est largement meilleur, pour finalement conclure que les deux se valent presque (avec néanmoins une petite préférence pour la version Fincher).

    4
    FreddyK
    Samedi 11 Février 2012 à 17:33

    Oui je comprends, c'est un peu paradoxale... Tout d'abord je confirme sans réserve ma préférence pour le Fincher qui est incontestablement meilleur, avec Noomi Rapace dedans pour une Lisbeth plus proche dans l'esprit du film suèdois ce serait même absolument parfait (pour moi en tout cas).

    Disons que je n'ai pas pris beaucoup plus de plaisir devant cette version que lorsque j'ai vu le film de Oplev. Je suis parfaitement conscient qu'il existe une sorte de prime à la nouveauté, avec la découverte d'une intrigue, de personnages qui fait que paradoxalement le film de Oplev m'a peut être plus marqué que celui de Fincher que je connaisais déjà d'une certaine manière.  Disons que la même chose en mieux ça reste toujours un peu la même chose quand même. Pour toi qui avait le livre en tête je comprends totalement que tu puisses être déçu par la version suèdoise et totalement enthousiaste vis à vis de celle ci plus proche de ce que tu attendais au départ en lisant le bouquin.

    Voilà, you're welcome no problemo.

    J'adore debattre avec toi et tu vas avoir d'autre occasion de venir ici puisque d'autres critiques divergentes de tes opinions vont arriver bientôt dans ma bulle. Par exemple je n'ai pas accroché du tout à A lonely place to die et ma critique de Mother's day sera un poil moins enthousiaste que la tiennne (disons un poil plus nuancée).

     

    5
    Samedi 11 Février 2012 à 18:24

    A vrai dire, ce qui m'a enthousiasmé, c'est surtout que même en revoyant la même histoire pour la troisième fois, j'ai trouvé le film passionnant. C'est là que j'ai trouvé le film de Fincher vraiment excellent, alors que la version suédoise m'avait laissé l'impression d'une adaptation assez littérale mais sans génie, et avait provoqué chez moi un ennui poli.

    Et puis j'ai vraiment du mal avec Michael Nyqvist en Blomkvist. Il est beaucoup trop effacé pour le rôle, et se fait bouffer tout cru par Noomi Rapace, alors que les deux personnages devraient être sur un pied d'égalité, ce que la version Fincher arrive beaucoup mieux à rendre.

    Bon, j'attends de pied ferme tes critiques de Mother's Day (que j'ai d'ailleurs très envie de revoir) et de A Lonely Place to Die (qui n'est certes pas exempt de défauts, mais dont à mon avis les qualités rattrappent largement les défauts).

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