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Melancholia
De Lars Von Trier
Danemark/France/Allemagne (2011) Drame / Fantastique / Spleen apocalyptique
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La fin du monde est proche et Lars Von Trier a choisit de la dépeindre de la manière la plus intimiste et intense qui soit. Là ou tant d'autres cinéaste ont trouvé un prétexte à un cataclysme d'effets spéciaux spectaculaires et totalement désincarnés le réalisateur danois pose un regard bouleversant et d'une rare puissance sur les derniers instants de l'humanité. Melancholia c'est la fin du monde version intime, l'apocalypse version spleen....
Melancholia c'est donc le nom d'une planète qui se dirige vers la terre et menace de la percuter. Deux sœurs Justine et Claire, aux comportements opposés, attendent entre angoisse et sérénité le moment ou Melancholia décidera du sort de la terre.
Melancholia est divisé en trois partie; la première est un prologue constitué d'images d'une beauté formelle assez époustouflante et noyé par la musique de Wagner. Des images en forme de rêve prémonitoires semblant directement sortir de l'esprit de Justine, des instantanés allégoriques qui annonce dès le début du film que la fin du monde aura bel et bien lieu et qu'elle sera étonnement paisible et magnifique. On retrouve ici les formidables qualités d'artiste et d'esthète de Lars Von Trier pour cinq minutes fascinantes entre lyrisme, spleen, mélancolie et poésie. Des images qui trouveront toute à plus ou moins long terme un écho dans le futur récit du film et qui annonce par la fin imminente du monde la vacuité des futurs comportements humains qui suivront.
Après ce prologue magnifique Lars Von trier revient à une forme plus abrupt de son cinéma en retournant vers les préceptes de son fameux dogme. Ce premier grand chapitre est consacré à Justine (Kirsten Dunst) et à son luxueux mariage dans la propriété de sa sœur et son beau frère. Le chapitre commence de la manière la plus légère qui soit avec un gag, comme une respiration, montrant le jeune couple à bord d'une longue et luxueuse limousine incapable de franchir les virages serrés d'une petite route escarpée de campagne ce qui va occasionner un monstrueux retard à la réception offerte pour leurs noces. Ensuite Lars Von Trier caméra à l'épaule va plonger Justine dans les conventions et les usages d'un mariage qui doucement vont la dépasser et faire naître en elle un profond sentiment de mélancolie désabusé. Alors qu'elle semble avoir tout pour être heureuse Justine va sombrer doucement dans une sorte de dépression et transformer de manière quasiment auto destructive sa soirée de noces en un cauchemar. Pas très loin de Festen, Lars Von Trier met alors au grand jour les petites faiblesse et les grandes mesquineries des hommes. Justine est plongée dans un panier de crabes et au cœur d'un monde dans lequel elle semble incapable de s'inscrire entre un père absent et incapable de l'écouter, une mère psycho-rigide et cassante, un patron qui la harcèle sans cesse pour lui faire cracher un slogan publicitaire, un beau frère totalement obsédé par le cout du mariage et un mari aimant et pressé de se ranger dans le cadre d'une vie bien formatée... Justine sombre alors doucement, le regard vide comme consciente de toute l'absurde futilité des promotions et bonheurs illusoires qui s'offrent pourtant à elle. Entre de fugaces moments de bonheur et des instants profond de mélancolie Justine traverse cette soirée tel un fantôme rejetant la moindre perspective d'avenir. Kirsten Dunst qui n'a pas volé son prix d'interprétation à Cannes est absolument magnifique et donne une belle intensité à ce personnage complexe pour lequel on ressent finalement autant de tendresse que d'antipathie.
Le second grand chapitre se concentre plus sur Claire (Charlotte Gainsbourg) la sœur de Justine au moment ou la planète Melancholia doit frôler ou percuter la terre dans quelques jours. Le personnage de Justine a alors totalement sombrer dans une profonde dépression qui la réduit à un état quasi végétatif incapable de se mouvoir. Pourtant à mesure que Melancholia s'approche de la terre Justine retrouve une forme de sérénité alors que Claire sombre doucement dans la peur de perdre tout ce qu'elle aime. Bien plus posé et presque apaisé dans sa mise en scène Lars Von Trier orchestre alors une inéluctable fin du monde dans laquelle, telle des vases communicants, la mélancolie devient sérénité alors que la bienveillance positive se transforme en chagrin et en peur. Léo Ferré écrivait que le désespoir était une forme supérieure de la critique et qu'il convenait de l'appeler bonheur, Justine semble alors trouver enfin dans la disparition d'une humanité qu'elle juge comme le mal de notre planète une forme de paix absolu. Pour Claire en revanche c'est une peur viscérale et une tristesse infini qui accompagne ses derniers instants. L'occasion de dire que le jury de Cannes aurait été bien inspiré d'associer Charlotte Gainsbourg au prix d'interprétation féminine de Kirsten Dunst tant l'actrice nous offre des moments d'intense et profonde émotion confirmant au passage que le soit disant misogyne Von Trier continue d'offrir de superbes rôles féminins. Le final de Melancholia est absolument magnifique, intense et bouleversant et se pose sans conteste comme le plus beau moment de cinéma de cette année 2011. Lars Von Trier cloue littéralement le spectateur au fauteuil par la puissance émotionnel implacable de ce qu'il nous donne à vivre et l'intensité de cet immense moment de cinéma. Jamais sur un écran de cinéma la fin de l'humanité n'avait été aussi intense, puissante, bouleversante et paradoxalement paisible.
Lars Von trier réussit une nouvelle fois un très grand film et à moins d'être totalement allergique à la mise en image parfois chaotique héritée du dogme il me semble impossible de ne pas ressortir vraiment ému du film. La planète Melancholia heurte aussi les spectateurs et sa déflagration mélancolique laisse des traces profondes longtemps après la fin du film. Même si elle ne fait que vous frôler cette étrange planète pourrait bien perturber vos sens et réveiller au plus profond un sentiment diffus mais intense de spleen magnifique.
Ma note: 09/10
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La momie Aztèque ( La momia azteca)
de Rafael Portillo
Mexique (1957) – Fantastique
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La momie aztèque est le premier gros succès fantastique du cinéma méxicain. Fort de ce succès, le film connaitra deux suites avec La malédiction de la momie aztèque et le prometteur La momie aztèque contre le robot. Le film de Rafael Portillo est un délicieux mélange un peu kitsch d'humour,de fantastique, de serial et de film de gangsters.
Le film raconte comment un petit groupe de scientifiques tente de prouver la véracité de leurs travaux sur l'hypnose permettant de revivre des vies antérieures. A la suite d'une nouvelle expérience et afin d'apporter une preuve tangible, ils se mettent en quête de retrouver un objet perdu dans un temple aztèque. Malheureusement en profanant cette sépulture sacrée ils vont réveiller une malédiction vielle de plus de 400 ans.
La momie aztèque est un sympathique petit film dans lequel on retrouve des réminiscences des classiques de Universal et des films de gangsters hollywoodien. Car finalement la première déception vient du fait que le film de Rafael Portillo, hormis son cadre culturel très marqué, ne semble pas particulièrement exotique. On suit donc avec un certain plaisir les expériences d'hypnose régressive, l'exploration du temple aztèque et le réveil, bien que trop tardif de la momie. En effet l'élément purement fantastique du film n'arrive que lors des vingt dernières minutes du métrage, ce qui est assez frustrant pour les amateurs de monstres qui aurait aimé que la momie aztèque frite les scientifiques et pas seulement pour le plaisir du jeu de mots. C'est d'autant plus dommageable que cette momie possède un look bien particulier et étrange entre le zombie et la créature de Frankenstein, bien loin de la figure habituelle du cadavre en bandelettes. Heureusement pour maintenir l'intérêt le film de Rafael Portillo s'articule également autour d'une sous intrigue impliquant un mystérieux voleur masqué surnommé la chauve souris (un ancêtre de Batman qui a visiblement abusé des tacos) et sa bande de malfaiteurs composés de malfrats à cravates à pois et chapeaux mous. Le film n'est pas non plus dénué d'humour grâce au personnage de Pinacate, un sorte de grand dadais maladroit et trouillard au faciès particulièrement expressif.
La momie aztèque est un film qui est bourré de petits défauts, si certains participent pleinement aux charmes de ce type de vieille productions d'autres sont bien plus rébarbatifs. On s'amusera donc de cette pauvre chouette empaillée aux mouvements d'ailes des plus mécaniques, à la reconstitution de la civilisation Inca se limitant à un dessin sur un carton, au coups de gong annonçant un danger et à la résolution de l'identité de l'homme chauve souris expédié en trois secondes chrono. Il est bien plus difficile de résister à la très longue séquence de la cérémonie dans le temple Inca, un flashback qui explique la naissance de la momie mais qui ressemble à un interminable spectacle de danse et musique folklorique. La momie aztèque souffre donc surtout de son manque de rythme et d'un dosage bien mal réparti entre les scènes anecdotiques et les moments plus fort.
La momie aztèque reste donc une petite curiosité fantastique finalement très agréable à regarder pour peu que l'on soit encore capable de s'abandonner aux charmes de ses vieilles productions.
Ma note : 06/10
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Gutterballs
de Ryan Nicholson
Canada (2008) Horreur /Slasher / Boule à zéro
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De toute évidence Ryan Nicholson est un réalisateur qui adore les slashers et les années 80 à moins qu'il aime bien plus simplement les deux réunis. Gutterballs est donc un petit film référentiel qui dés sa campagne publicitaire s'amusait à parodier des affiches mythiques du genre tels que Maniac ou Halloween. Un film à priori pavé des meilleurs intentions mais qui se révèle finalement une grosse déception bien nase et à la limite du regardable.
Gutterballs c'est l'histoire de deux bandes rivales de jeunes trous du cul qui se défient régulièment au bowling lors de soirée privée après la fermeture de l'établissement. Un soir ils vont devoir faire face à un mystérieux tueur portant un sac de bowling sur la tête en guise de masque et qui semble fermement décidé à éliminer un à un l'intégralité de personnes présentes.
Ryan Nicholson semble finalement n'avoir retenu des années 80 que ses aspects les plus vulgaires et les plus kitsch. Pour commencer Gutterballs est déjà un film particulièrement laid qui ne prend même pas le temps d'éclairer correctement et mettre un minimum en relief son décor pourtant unique. Certes Ryan Nicholson joue des lumières au néons, des musiques synthétiques et des effets de fumée mais il le fait de manière bien paresseuse et sans le moindre talent. Mais tout ceci n'est rien par rapport à la galerie de têtes de nœuds assez hallucinantes que Nicholson nous balance en guise de personnages. C'est bien simple je crois de toute ma mémoire de cinéphage je n'ai jamais autant voulut voir disparaître le plus vite possible l'intégralité du casting. Au bout de dix minutes on espère presque qu'un missile nucléaire vienne atomiser cette bande de crétins pour que le film se termine comme un court métrage. Il n'en sera malheureusement rien et on devra se coltiner durant 90 minutes des personnages monstrueusement ineptes et interprétés à la louche par des acteurs totalement en roue libre qui vont donner au film un bien triste aspect de parodie. Entre le loubard au rire de hyène hystérique, le black qui passe son temps à peigner sa touffe afro, l'adepte de new age recouvert de badge, la punkette, le gros travestie, le timide à lunettes; je trépignais d'impatience de les voir tous se faire trucider et définitivement éjecter du film.
Gutterballs est aussi terriblement primaire et crétin dans sa déroulement mécanique et sans surprise qui pourrait se résumer en trois étapes: Je vais chercher une bière, je rencontre une pouf à sauter et je me fais assassiner comme un con. Le tout sans que les autres personnages ne se formalisent plus que cela de se voir de moins en moins nombreux autour des pistes de bowling. Mais le plus insupportable reste la vulgarité sans nom des dialogues qui finissent par donner tout simplement envie de stopper le film. C'est amusant cinq minutes de voir des personnages incapables de dire une phrase sans y placer les mots enculé, connard, cul, putain, merde et chier, mais au bout d'une demi heure ça devient carrément saoulant et même insupportable de puérilité au bout d'une heure de film. 90 de blagues scabreuses sur les « boules » c'est juste un peu au delà de mon seuil de tolérance au comique de répétition. Le pire c'est que cette vulgarité fortement teinté de connerie finit par transparaitre sur l'intégralité du film et transforme une scène pourtant très sombre et violente de viol en un morceau de portnawak lamentablement grotesque. Ryan Nicholson souhaite peut être jouer sur le registre du politiquement incorrect, du cul, de la grossièreté et du gore mais il ressemble juste à un sale gosse pitoyable qui dit des gros mots en montrant son cul et à qui on a immédiatement envie de foutre une magistrale baffe dans la gueule avant de l'envoyer au lit revoir les films auxquels il prétend rendre un si pitoyable hommage.
On pourra juste sauver deux trois trucs de Gutterballs comme ses clin d'œil à Halloween, Vendredi 13 , Le retour des morts vivants ou Re-Animator, son générique qui pastiche celui de Les griffes de la nuit et quelques effets gores assez réussi comme la tête plongé dans la machine à cirer les boules de bowling. Pour le reste c'est juste 90 minutes de connerie mal branlé d'autant plus énervante que Nicholson semble prétendre à travers son film rendre hommage à tout un pan de cinéma autrement plus bandant et sérieux que le sien (Je crois que je suis possédé par la vulgarité du film).
Quand on a du talent pour rendre hommage aux années 80 on réalise House of the devil comme Ti West et quand on a un QI d'adolescent attardé bloqué au stade anal on fait Gutterballs.
Ma note: 02/10
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Agnosia
de Eugenio Mira
Espagne (2010) Thriller / Romance / Pas fantastique !
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En dépit de son bel emballage qui prend un malin plaisir à nous faire croire le contraire et de nombreux site internet qui le prétendent aveuglément, Agnosia n'a rien d'un film fantastique qui s'inscrirait dans la veine de L'orphelinat ou Le labyrinthe de Pan. Une précision des plus importante pour éviter comme moi d'attendre deux heures que commence un film qui n'arrivera finalement jamais.
Agnosia raconte l'histoire de Joanna, une jeune fille souffrant d'une maladie qui altère ses cinq sens et donc sa perception du monde qui l'entoure. A la mort de son père la jeune fille se retrouve seule détentrice du secret de fabrication d'un produit industriel de grande valeur et fortement convoité. Prêt à tout pour récupérer ce secret et conscient de la fragilité de la jeune femme un puissant groupe industrielle organise un plan pour piéger Joanna et lui soutirer le secret de fabrication de cet objet qui pourrait révolutionner l'industrie de l'armement.
Agnosia est un film qui ne manque pas d'ambition mélangeant reconstitution historique, romance et thriller sur un fond assez inédit d'espionnage industrielle. Un récit assez complexe et aux enjeux multiples que Eugenio Mira prend le temps de poser scrupuleusement donnant à son film un rythme de croisière plutôt lent voir pesant. Quand au plan mis en place pour soutirer des informations à cette jeune fille, il consiste simplement à l'isoler et lui envoyer un homme à la place de son futur époux pour jouer avec la confusion de ses sens et recueillir des confidences sur l'oreiller, ce qui est finalement assez banal. Pour moi qui rêvait déjà d'une sorte d'Inception fantastique dans un univers onirique de réalité alternée, la déception est juste énorme car encore une fois Agnosia n'a strictement rien d'un film fantastique.
La déception ayant balayé toute mon attention je ne pourrais que juger assez sévèrement Agnosia et la direction romantique que le film va prendre dans sa dernière demi-heure. Eugenio Mira fait doucement glisser son récit vers une confusion des sens amoureux en faisant naître une histoire d'amour bien plus forte entre Joanna et son faux prétendant qu'avec son véritable futur époux. L'histoire s'oriente alors vers un triangle amoureux dans lequel Joanna devra choisir l'homme qu'elle aime le plus entre un imposteur qui lui aura révéler la passion tout en la trahissant et un futur époux plus distant pour lequel elle ressent maintenant une flamme bien moins vivace.
Difficile donc de juger objectivement Agnosia tant le film est différent de celui que j'espérais voir. Le film de Eugenio Mira est objectivement d'une très belle tenue visuelle, riche et complexe dans son histoire, plutôt original dans son concept d'espionnage industriel et porté par de très bon comédiens. Après pour quelqu'un qui espère un grand spectacle fantastique Agnosia est surtout très long, trop académique et monstrueusement décevant.
Ma note : 05/10
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Grotesque ( Gurotesuku)
de Kôji Shiraishi
Japon (2009) Horreur / Torture Porn
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Autant le dire tout de suite en préambule de cette critique je n'ai aucune affection particulière pour les torture porn, cette forme abrupt, crapoteuse et un peu gratuite de l'horreur me laisse le plus souvent totalement perplexe. Pourtant et comme je suis bourré de paradoxes, j'adore aussi être dérangé, perturbé, mis mal à l'aise et bousculé dans ma position de spectateur de films horrifiques ce qui me pousse à aller toujours regarder les pires productions du genre. Grotesque du japonais Kôji Shiraishi a le mérite d'ouvrir le débat sur ce que doit être un torture porn, sur la légitimité de ce sous genre de l'horreur et sur les attentes prétendues ou bien réelles des amateurs d'horreur.
Faire le résumé de Grotesque est une chose facile puisque le film de Shiraishi ne raconte volontairement pas grand chose. On regarde donc pendant 75 minutes un type qui séquestre un couple de jeunes tourtereaux afin de leur faire subir les pires tortures et humiliations possible juste parce que cela lui donne du plaisir.
Comme on peut le constater Kôji Shiraishi ne s'embarrasse pas de fioritures d'écriture et concentre son récit de la manière la plus primaire possible. Ici pas de contexte, pas d'explications psychologiques aux motivations du bourreau, pas de mise en place de l'intrigue; Grotesque est un film qui rectiligne et droit au but. On es pas très loin du minimalisme malsain des Guinea Pig et surtout d'une écriture proche de la pornographie dans laquelle l'histoire n'est qu'un prétexte à introduire un maximum de séquences de cul ici remplacè par des séquences gore. Kôji Shiraishi semble presque nous dire que tout l'emballage contextuel n'est que pur hypocrisie et qu'il convient de servir de la manière la plus brutal qui soit ce que les spectateurs viennent rechercher. Reste à savoir si Shiraishi a raison ou si il se plante dans les grandes largeurs en dépouillant à ce point le cinéma d'horreur ? Le débat est ouvert et les avis que j'ai pu glaner sur le net montre que certains trouvent encore la démarche de Kôji Shiraishi bien trop soft préférant des œuvres plus underground et dégueulasses comme Snuff 102, A serbian film ou August underground mordun. Une surenchère presque inquiétante pour obtenir non plus le titre de meilleur film d'horreur mais celui de l'œuvre la plus extrême et insupportable. Même si je pense que le cinéma d'horreur doit bousculer les esprits et rester un spectacle dérangeant par certains aspects, on peut aussi se demander si la limite n'est pas de rester dans le cadre purement cinématographique. Dans un soucis de toujours faire plus glauque, plus violent, plus malsain, plus gratuit, plus extrême on risque de vite se retrouver avec des petits malins tournant comme des amateurs et sans le moindre recul des viols de petites filles éventrées par des nains qui se font sodomiser par une tronçonneuse tout en se faisant aspirer les yeux à la paille par des obèses en train de déféquer dans la bouche de femmes dépecées.... Il faut pourtant ne pas oublier qu'un bon film d'horreur se doit avant tout d'être un bon film tout court.
Alors finalement que pensez de Grotesque ? Et d'ailleurs peut on tout à fait prendre au sérieux un film dont le titre évoque d'emblée la caricature, l'excès et la farce ? De toute évidence Shiraishi voulait remettre les pendules à l'heure et rendre aux asiatiques la légitimité du torture porn radical et rentre dedans comme un pied de nez ou plutôt un violent coup dans la gueule à la vague post Saw et Hostel. Grotesque est effectivement malsain, parfois dérangeant comme lors de la longue scène de masturbation, provocant, douloureux dans son plaisir sadique à martyriser les parties les plus sensibles du corps mais peut être même pas totalement gratuit. Le film de Kôji Shiraishi n'est pas totalement à vivre au premier degré et comporte quelques touches d'humour grotesque forcément et absurde comme lorsque le bourreau met un doigt coupé dans le nez de sa victime ou lorsque lors du final le trauma du psychopathe est caractérisé par le fait qu'il sente comme un vieux dessous de bras. On peut alors franchement se demander si le réalisateur ne se moque pas ouvertement des productions américaines, de leurs justifications psychologiques à deux balles et de leurs scènes de torture qui n'osent jamais aller trop loin ? Et puis Grotesque possède quelques qualités purement cinématographiques comme une très belle direction d'acteurs (l'acteur qui incarne le bourreau est assez fascinant) et une rupture de ton dans l'écriture assez inattendue et particulièrement cruel. Pour le reste on notera aussi un final aussi romantique que excessif dans lequel il faudra sortir ses tripes pour prouver son amour alors qu'une tête tranchée versera une petite larme presque émouvante sur une joue couverte de sang.
Grotesque est donc un film qui a le mérite de poser des questions à défauts d'apporter des réponses. En ce qui me concerne je serais bien incapable de dire si j'ai apprécié ou non cet étrange spectacle de souffrances et d'humiliations. J'ai juste la sensation que Grotesque se situe à la frontière ou le cinéma d'horreur commence à se vautrer dans la facilité et à basculer dans un autre genre de spectacles plus destiné aux amateurs tordus de violence qu'aux amateurs de cinéma.
Ma note : 05/10
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