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Après ce fut pour moi les années lycée et les longues soirées vidéos entre potes. Les vidéos clubs esquissaient déjà une très lente mutation; Nata vidéo avait désormais sa boutique et ses vitrines, les films à cinq francs n'existaient plus remplacés par deux catégories de prix avec toujours les nouveautés à 25 francs et les autres films à 20. Déjà on ne pouvait plus repartir chez soit avec le boitier et la jaquette, simplement avec le film dans une boite anonyme et toute moche; les rayonnages étaient alors remplis de boitiers vides pour éviter la fauche et de numéros sur des petites cartes qu'il fallait prendre pour aller chercher son film au comptoir comme à la sécu. Je discutais encore assez souvent avec le gérant du club qui me disait déjà un poil désabusé que les gens ne venaient plus louer des films mais pour prendre et voir avant tout le monde uniquement ce qui était nouveau. Du coup avec un brin de malice il collait souvent une étiquette nouveauté sur des films plus anciens qu'il aimait bien pour inciter les gens à les louer.
Le bon plan avec les potes c'était surtout qu'on pouvait réunir notre thune pour louer deux ou trois films et se faire des soirées qui se déroulaient quasiment toujours de manière immuable autour de pizzas. On commençait toujours par un gros film qui nécessitait concentration, attention et réflexion puis on poursuivait avec un film d'horreur pour terminer devant des films bien plus légers qui étaient souvent des comédies que l'on regardait les paupières lourdes et un filet de bave au coin des lèvres. On terminait parfois à deux ou trois heures du matin la tête dans le rectum en étant incapable de donner un quelconque avis sur le dernier film avalé par le magnétoscope. C'était aussi et déjà le plaisir de faire découvrir des films aux potes (Evil dead's Virus), les avis divergents, les débats enflammés, les prises de tronches tout en gardant en point de mire l'essentiel, à savoir bouffer toujours et encore plus de bandes magnétiques entre amis. On était pas du genre à sortir en boîte pour écouter de la techno de merde sous des lumières stroboscopiques, on voulait juste nourrir nos yeux et nos oreilles d'émotions plus fortes. Ce fut aussi l'époque ou en se croyant soudainement réalisateurs on tentait de faire des petits court métrage avec le caméscope familiale... On tournait la nuit dans les rues désertes, on piquait les caddy de supermarché pour faire des travellings, on inventait des histoires improbables de tueurs sortant d'une télévision, de voyante meurtrière, de types qui s'entretuaient pour disposer d'un magnétoscope et tout ça pour le plus souvent n'aboutir à rien. Je crois que l'on a jamais terminé un seul film, on avait simplement pas suffisamment de moyens technique pour faire du montage, mixer de la musique.... Mais putain c'était des nuits de pure folie, on rêvait de cinéma des heures entières, on passait des nuits blanches à inventer des plans et à érire des histoires, à comprendre la mécanique d'un tournage, on faisait juste avec l'énergie avec les moyens du bord. Le plus beau film qu'on a finalement jamais réalisé ce sont les images des souvenirs qu'ils nous reste encore, à moi et mes amis, de cette bien belle époque.
Bizarrement je n'avais jamais trouver utile cette possibilité qu'offrait les magnétoscopes d'enregistrer, conserver et collectionner les films qui passaient à la télévision. Pour moi c'était absolument clair il fallait surtout regarder un maximum de films sans trop perdre de temps à toujours revoir les mêmes. Mais d'un autre coté je trouvais ça bien sympathique lorsque des potes pouvaient me prêter des films enregistrés sur Canal + surtout que je n'avais pas encore du tout accès à cette chaîne. Le virus de l'enregistrement commencera bien plus tard lorsque la chaîne cryptée arrivera finalement dans la maison. Et puis on commençait surtout à parler de piratage et de copies avec la chute des prix des magnétoscopes et là ce fût le déclic car la simple idée d'avoir les films du vidéo club à la maison me faisait sacrément envie. Encore fallait il avoir deux scopes, des cassettes vierges, le budget pour louer les films et passer sur cette sorte de légende urbaine qui disait qu'en branchant deux magnétoscopes ensembles on risquait via un système de sécurité de bloquer les deux machines avec les cassettes dedans. Je me souviens parfaitement de ma première opération copies, j'avais réussi à emprunter pour une semaine le magnétoscope d'un ami de mon frère le temps qu'il était en vacances et même sa télévision. Il faut dire que la seule façon de copier avec ce dont je disposais à l'époque était de mettre un magnétoscope en lecture alors que l'autre enregistrait directement les images qui passaient sur la télévision. Du coup il fallait laisser la télé allumée le temps de la copie pour un résultat finalement assez moyen. On devait être en 1987 ou 88, j'avais réservé 37°2 le matin et Les griffes de la nuit puis j'avais copié deux ou trois autres films dont Evil dead fatalement, car même après douze locations je n'avais pas gagner le droit de garder le film. La cinq et la six avaient débarquées sur nos télévision et je commençais alors à enregistrer Les accords du diable avec Sangria, Les nuls, quelques films et beaucoup de bandes annonces. J'achetais le magazine Télé vidéo jaquette, des jolis boitiers et tout doucement je devenais un collectionneur de plus en plus maniaque et passionné.
Les années 80 se terminaient alors laissant la place à l'ultime décennie du siècle. Mon bac en poche j'allais pointer au chômage (classique) pour finir par bosser à la mise en rayon d'une grande surface. Après direction l'usine mais peu importe ,je gagnais enfin de l'argent, je m'étais construit un univers de référents cinématographiques, j'avais une certaine idée de ce que serait ma culture et mon approche du cinéma, je savais surtout que j'avais maintenant ce besoin presque viscéral d'images, de sensation et d'évasion. Le cinéma et les films avaient bouffé mon adolescence les yeux rivés à un écran, ils m'avaient aussi construit en tant que personne, je ne regardais pas simplement des films je les vivait, je les absorbait et ils étaient comme autant d'expériences vécus. C'était désormais une évidence, il me fallait m'entourer de films, il fallait conserver comme autant de souvenirs tous les films que j'aimais tellement, comme des objets rassurants, comme autant de possibilités d'évasion à portée de main, comme autant d'émotions toujours à disposition. Il fallait construire une bulle hors du temps, hors du monde, une alternative à la réalité dans laquelle je pourrais pour l'éternité me laisser bercer par les rêves, les illusions et la magie du cinéma, pas simplement un monde pour vivre par procuration mais un univers pour vivre tout simplement. J'ai alors commencer à enregistrer et copier frénétiquement des dizaines, des centaines de films que je notais sur un répertoire..... Il fallait juste garder la légèreté et l'élasticité de la bulle pour ne pas se retrouver enfermé dans une passion trop dévorante qui deviendrait une prison. Fort heureusement même dans les quelques moments un peu plus dur de la vie comme la perte de proches et les déceptions amoureuses durant lesquels la tentation fut grande de totalement se perdre dans une alternative fantasmé du réel, j'avais mes plus fidèles amis et ma famille qui me faisaient toujours garder les pieds sur terre et comprendre que l'on pouvait vivre des choses magnifiques à chaque seconde de notre vie et qu'il était important de savoir en profiter aussi.
Pendant plus de dix ans j'ai alors enregistrer et acheter de manière compulsive des tonnes de films. J'étais maladivement exigeant, dangereusement maniaque et il m'arrivait de réenregister des dizaines de fois un même film pour toujours avoir une meilleur qualité de son ou d'image. Je ne supportais pas d'avoir un truc devant le film qui devait commencer au tout début de la cassette, il était impossible d'imaginer un logo sur l'image, une coupure de pub ou un générique de fin amputé. Je jouais de la touche pause pour les épisodes de Twin peaks ou X-files en espérant qu'elle tienne tout le temps de cette foutue publicité de merde, je vérifiais le moindre petit enregistrement . Pour combler le vide je complétais le temps restant derrière les films en enregistrant et en copiant des bandes annonces et des making of, j'inventais le concept des bonus sans le savoir. c'était pour moi une hérésie totale de mettre deux films sur une même cassette VHS, chacun devait avoir droit à son boitier et sa propre jaquette. Une autre passion dévorante et addictive était alors entrer dans ma vie avec les jeux vidéos et les soirées entre amis et amies sur Mario, Tetris, Megaman, Zelda et compagnie, Nintendo et Sega étaient devenu des alternatives aux soirées cinoche...... On pouvait même jouer à Dirty Harry en flinguant des canards avec un magnifique pistolet orange vif très viril. Comme le dit un intervenant du très bon documentaire Suck my geek « Je ne sais pas si ça coûte cher d'être un geek mais ça nous coûte tout ce que l'on a « .
Après cette période j'ai la sensation que tout s'est emballé très vite à mesure que la technologie ne cessait de rendre obsolète ce que nous pensions être pourtant une petite révolution technique. Les consoles de jeux se succédaient à un rythme soutenu de la Nes à la Playstation en passant par la Megadrive et la super Nintendo. La plupart des petits vidéo clubs avaient totalement disparus, les gros boitiers ronds étaient devenus des petits carrés, les grandes enseignes de location avaient bouffer les petits indépendants, Canal + et les paraboles avaient rendus obsolète la richesse des vidéo clubs qui ne tournaient plus que sur la sortie des dernières nouveautés. On ne me demandait plus jamais si j'avais aimé le film lorsque je le retournais au guichet du magasin, car les vidéos clubs étaient devenus des boutiques comme tant d'autres, des enseignes commerciales dans lesquelles les gens derrière le comptoir étaient aussi passionnés par ce qu'ils vendait que les caissières d'hypermarchés par les boites de choucroute. Les chaines de télévision étaient de plus en plus nombreuse, les bouquets satellites arrivaient, le prix des films à la vente devenait raisonnable et surtout le DVD pointait déjà le bout de son nez annonçant doucement mais certainement la mort de la bande magnétique. La VHS était déjà H.S mais dans le coeur des nostalgiques de cette époque c'est certain qu'à jamais elle bande (magnétique) encore.
Et bien voilà, nous sommes au moment ou j'écris ces quelques lignes en novembre 2011, un soir d'automne assez propre à la mélancolie. Je regarde autour de moi, il me reste encore des centaines de cassettes vidéo mais doucement les DVD grignotent leur espace sur me étagères. J'ai des cartons plein de films enregistrés dont plus personne ne veux, j'ai encore des milliers d'heures d'émission, de séries, de bande annonces, de concert enfermées dans des boites. Par faute d'espace j'ai du me séparer de la plupart des VHS de films après les avoir racheter en DVD, je ne garde que celles qui ont une forte valeur sentimentale et qui sont porteurs de souvenirs allant bien au delà du film lui même. J'ai peut être autour de moi bien plus d'heures d'images que je ne pourrais jamais en revoir mais peu importe certains objets ont un pouvoir magique, une aura qui fait que le fait de simplement les regarder nous rend déjà heureux. Je regrettes souvent d'avoir bazardé mes vieilles consoles à cartouches et les nombreux navets magnifiques que j'avais acheté en VHS dans des solderies.
Si je regarde bien plus loin que ma bulle je vois des cinémas qui sont devenus des hangars froids comme des supermarché, les photos d'exploitations ont disparus et les films n'existent que le temps de leur couverture médiatique. Toute une nouvelle génération de consommateurs de cinéma gavent jusqu'à l'overdose des disques durs entiers de films qu'ils ne regarderont jamais, les chaines de télévision sont souvent des robinets discontinus à films, les vidéos clubs sont devenu des guichets automatiques à peine plus chaleureux que des distributeurs de billets... Nata vidéo a fermé ses portes depuis bien trop longtemps déjà, la VHS est morte et j'ai soudainement la sensation d'être déjà devenu un vieux con nostalgique. J'ai juste parfois envie de fermer les yeux et de me laisser bercer par le ronronnement d'une bonne vieille VHS tournant dans un magnétoscope, écouter le son si particulier de la cassette qui arrive en fin de bande et qui se rembobine de plus en plus vite pour revenir au tout début. J'aimerais alors pouvoir ouvrir les yeux et avoir fait comme cette foutue bande magnétique un retour vers le moment ou tout commence, appuyer sur la touche lecture et pouvoir refaire éternellement le chemin afin de retrouver l'époque ou les grands boitiers faisaient « clop » comme par magie quand on les ouvraient. Ce soir ma bulle est bien nostalgeek ....
A mes amis, à ma mère, à mes frères et soeurs et à Nata video
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Un petit coup d'avance rapide et nous voilà vers 1984, j'avais alors droit à dix francs d'argent de poche par semaine (Et oui 1,50 euro !) plus quelques extras en cas de bons et loyaux services dans l'aide ménagère (Saloperie de vaisselle). En gros toutes les deux semaines j'avais les vingt cinq francs nécessaire pour louer un film et donc bénéficier des deux autres titres gratuit. Les trois premiers films que j'ai loués avec mon propre argent étaient Rencontres du troisième type de Spielberg comme film payant, Accroche toi j'arrive (une comédie policière avec Elliott Gould) et Bruce contre attaque avec un clone assez mal dégrossi de Bruce Lee. Comme mes frères continuaient de louer eux aussi des films de leur coté il n'était par rare de se retrouver avec six cassettes à regarder dans le week-end à la maison. Du coup on rendait bien trop souvent des films sans même les avoir vus. Mes choix ne se portaient pas particulièrement encore vers le fantastique et l'horreur mais plutôt vers les comédies, les films policiers, les films d'action et d'aventures et surtout j'apprenais doucement à aller vers des films un peu plus complexes que La toubib du régiment ou Comment se faire réformer. Je commençais à lire un peu les magazines de mes frangins comme vidéo7, ciné revue et première et peu à peu j'avais envie de voir des films plus dramatiques et plus adultes. Je découvrais alors des films comme La fureur du danger, Le convoi, Le ruffian, L'équipée du Cannonball, les films avec Belmondo mais aussi les comédies du Splendid, les films avec Jerry Lewis et quelques gros chocs dont je ne cernais pourtant peut être pas encore toute la portè comme Vol au dessus d'un nid de coucou, Coup de tête, Rocky ou Voyage au bout de l'enfer. En novembre 1984 arrivait Canal+ , une nouvelle chaine de télévision payante qui se singularisait par la diffusion de films que l'on pensait alors totalement réservés aux vidéos clubs y compris pornographiques. Le cout de l'abonnement, la nécessite d'utiliser un canal spécifique, le besoin d'une prise péritélévision cantonnait toutefois la chaîne à péage à quelques privilégiés sans entamer d'un pouce la suprématie écrasante de la location. Je me souviens juste que dans mon collège il y-avait un type qui a certainement du finir banquier, escroc ou trader qui proposait d'acheter à des prix exorbitant les films enregistrés sur Canal +. Il faut dire qu'avec un magnétoscope et Canal + tu pouvais assez vite devenir le roi du pétrole....
Victime de son succès grandissant et d'un nombre de films de plus en plus important Nata vidéo déménage alors pour s'installer dans un appartement bien plus grand et spacieux, toujours sans vitrines ni publicité. La formule un film loué et deux gratuits disparaît laissant la place à un système de locations à différents tarifs allant de 25 francs pour les nouveautés à cinq pour les films les plus anciens. Mine de rien avec 25 francs on pouvait donc repartir avec cinq films plutôt que trois et là ce fut l'orgie totale de locations pendant plusieurs mois. Je n'avais plus de restriction parentale sauf sur les boulards et comme les films à cinq francs étaient souvent des films d'horreurs je louais simplement tout et absolument n'importe quoi. Il fallait juste négocier la disponibilité de la télé avec mes frères et sœurs pour avoir le temps de regarder les films que je louais. Par chance même si Nata vidéo ouvrait maintenant les samedis on pouvait garder les films à cinq francs plusieurs jours sans la moindre pénalité de retard. Tout en continuant à regarder plein d'autres films, à forger ma curiosité et mon sens critique j'ai commencer à louer et regarder quasiment l'intégralité du rayon fantastique et horreur du vidéo club. Impossible de citer ou même me souvenir de l'intégralité des films que j'ai dévoré à cette époque et même mon petit guide bleu ne réveille que de vagues souvenirs de films tels que Une si gentille petite fille, Les cloches du diable, Pyromaniac, La tour du diable, Panic, Murder clinic, Le pouvoir des plantes, Les cartes ne mentent jamais ou Cannibal man. C'était l'époque des belle jaquettes aux visuelles clinquants signé Melki et des nombreux éditeurs tels que Hollywood vidéo, Scherzo vidéo, Proserpine, Sunset vidéo, Super vidéo production, Embassy, South pacific vidéo, Delta vidéo, Thorn Emi, Polygram, RCV, Vista vidéo, Coktail vidéo et des dizaines d'autres distributeurs qui disparaitront presque tous au fil du temps. Je découvrais alors en regardant Vendradi 13, Carnage, Carrie, La nuit des masques, La colline a des yeux ou Le monstre est vivant, que j'adorais me faire peur et que j'aimais le coté fascination répulsion que procurait la violence et l'horreur.
Les plus grands chocs de cette époque je les doit déjà à René château Vidéo et sa célèbre et mythique collection « des films que vous ne verrez jamais à la télévision ». Les cinq titres phares de cette collection étaient tout de même Maniac de William Lustig, Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper, Zombies de Romero, Chair pour Frankenstein de Morrisey et Le fameux Crocodile de la mort de Hooper. Pourtant je crois qui si je ne devais retenir qu'un seul et unique monstrueux souvenir de cette époque de la VHS ce serait ma toute première vision de Massacre à la tronçonneuse. J'avais déjà vu de nombreux films d'horreur et du coup sur le registre « Même pô peur.. » j'ai commencer à regarder le film de Tobe Hopper seul un soir après 22heures et là il m'est presque impossible de décrire le choc tétanisant du film. La VHS était usé jusqu'à la corde renforçant l'aspect crasseux et maladif de l'image, les couleurs bavaient de manières bien dégueulasse, l'image était piqué, la bande vidéo sautait, le son avait parfois le hoquet mais putain je n'ai jamais vu le film de Tobe Hooper dans des conditions aussi immersives, intenses et absolument inoubliables. J'étais scotché dans mon fauteuil, presque incapable de bouger, j'en aurai presque fait dans mon froc, mais au fond de moi je savais que j'avais devant les yeux le cinéma qui me ferait pour toujours le plus triper. J'adorais cette magnifique sensation d'un film si fort qu'il avait un impact sur notre corps et notre physique. Avoir ce nœud dans le ventre, cette peur dans le bide, cette sensation d'inconfort, ce léger tremblement, cette fascination qui vous absorbe corps et âme vers l'écran c'était juste aussi terrifiant que jouissif. J'adorais alors reprendre cette phrase de Renaud un poil détournée pour en faire une sorte de profession de foi qui me convient encore totalement aujourd'hui "Je veux que les films soient des caresses ou des coup de poing dans la gueule, peu importe a qui ils s'adressent faut que ça me remue dans mon fauteuil
D'autres soirées d'inconfort et de terreur viendront ensuite avec L'exorciste, Montclare rendez vous de l'horreur (qui me ferait peut être bien rire si je le revoyais aujourd'hui), Maniac ou La nuit des morts vivants, mais rien de vraiment comparable avec l'autre choc horrifique de l'époque qui était le Suspiria de Dario Argento. J'avais loué le film une première fois mais la bande était vraiment trop pourri et le film ne cessait de passer de la couleur au noir et blanc. Contrairement à Massacre à la tronçonneuse les défauts techniques, cette fois ci, plombaient vraiment le film, du coup j'ai du rendre la VHS sans l'avoir vu. Plus tard je l'ai finalement reloué dans un autre vidéo club et là ce fut un nouveau choc monstrueux, bien moins viscéral que pour le film de Tobe Hooper mais j'ai tout de même commencer le film dans le noir pour terminer toutes lumières allumées. Le plus horrible c'était sans doute la musique des Goblins qui ne cessait de trotter dans ma tête des jours et des jours après avoir vu le film. Je me souviens aussi du distributeur Hollywood vidéo, pas spécialement pour les films mais surtout pour la ribambelle de bandes annonces de films d'horreur que l'on pouvait voir après dont celles de Sœurs de sang, La colline a des yeux, Rayon Laser, Contamination, Les tueurs de l'éclipse, Le couloir de la mort, Le venin de la peur, Terreur extra terrestre, Frissons et surtout celle totalement culte de La dernière maison sur la gauche avec cette voix caverneuse calée dans les burnes qui répète sans cesse que « Ce n'est que du cinéma...du cinéma.... du cinéma ». Je ne sais plus exactement c'était après quelle film, mais une bande annonce m'avait totalement alors totalement bluffé et effrayé, c'était un petit film à l'image étrange qui s'appelait Evil dead . Ce n'est finalement pas un film que j'ai découvert avec Evil dead mais un virus qu'il me fallait absolument transmettre à tout le monde, du coup le film de Sam Raimi reste incontestablement le film que j'ai le plus louer durant cette période car il fallait que tous mes amis le voit. A cette magnifique époque je découvrais aussi les Mad Max, Soldat bleu, Les valseuses, Série noire, Midnight express, les monty python avec Sacré graal, Blade runner et Pink Floyd The wall qui est encore et toujours l'un de mes films culte.
Rien, pas même l'offre actuel en matière de DVD ne remplacera jamais ces premières années des vidéo clubs avec cette masse impressionnantes de titres disponibles d'un seul bloc, avec en plus une telle diversité de genre et de qualité soudainement mise sur un même plan. On imagine assez difficilement aujourd'hui ce que pouvait représenter cette véritable révolution magnétique qui fait que je pense encore aujourd'hui que les vidéos clubs restent les derniers temples officielles de la contre culture en France. D'un seul coup et quasiment du jour au lendemain on passait de la programmation pépère de trois chaînes de télévision pas vraiment adepte de l'audace à des milliers de films qui allaient des grands classiques de Chaplin aux western spaghettis en passant par les films de Kung fu, les films de monstres japonais, les films d'horreur, les comédies trash de John Waters, les giallo, les films de cannibales italiens.... Tout était disponible comme ça d'un seul coup et d'un seul bloc comme trois tonnes de cassettes et de sensation qui nous tombait soudainement sur le coin de la gueule. Et même si les les qualités techniques étaient souvent limites, que les films étaient souvent recadrés à la tronçonneuse, que les doublages des versions françaises étaient absolument honteux (C'était l'horreur sur les films asiatiques), on pouvait enfin découvrir tout un pan de cinéma dont bien peu de monde parlait à cette époque à part deux nouvelles revues qui sortaient en librairie et qui s'appelaient Starfix et Mad movies . Toute une génération de futurs geeks passaient alors souvent leurs nuits les yeux rivés sur un écran de télévision dans lequel il se passait enfin quelque chose. Des milliers de gens pour qui le simple « clop » de l'ouverture d'un boitier vidéo était une porte ouverte vers un autre monde.
A suivre (...)
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Polisse
de Maïwen
France (2011) – Policier /Com Dramatique – Chronique d'une détresse trop ordinaire
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Après deux premiers films parfaitement égocentriques et parfois horripilant de prétention auteurisante sur sa famille et son métier de comédienne, la jeune actrice et réalisatrice Maïwen revient avec Polisse. Pour son troisième long métrage Maïwen choisit donc plonger le spectateur dans le quotidien d'une brigade de police spécialisé dans les affaires de mineurs. Fatalement le film lorgne bien plus du coté du Police de Pialat que vers celui de L'arme fatale. Maïwen choisit de coller au plus près des ses acteurs et de leurs personnages en s'attachant uniquement à la dimension humaine de la fonction de flic.
Polisse c'est donc l'histoire de Melissa (Maïwen) une jeune photographe mandatée par le ministère pour réaliser un ouvrage de photographies sur le quotidien de la BPM (Brigade de protection des mineurs). La jeune femme va alors se retrouver plonger au cœur d'affaires de meurs, de viol, d'attouchements sur mineurs et découvrir comment les hommes et les femmes de cette brigade tente de concilier tant bien que mal leur vie professionnel et leur vie privée.
Polisse est un film que me laisse un sentiment pour le moins partagé pour la simple raison que j'ai le sentiment que Maïwen réussit à peu prêt une scène sur deux. Autant le film est absolument formidable et quasiment sans la moindre fausse note lorsque il suit ses flics dans l'exercice de leur métier, autant il cesse très souvent de m'intéresser pour ne pas dire plus dès l'instant qu'il s'égare sur les problèmes de couples et la vie privée des personnages. Les histoires de divorce, d'anorexie, de sexe et d'amour entre les protagonistes qui sont censé montrer les difficultés à se détacher totalement de leurs fonctions tombent bien trop souvent à plat à mon goût. Malheureusement quasiment toutes les scènes plus intimiste impliquant les individus plutôt que la vie du groupe semblent artificielles et finalement n'apportent pas grand chose au film dans son intégralité. Maïwen réussit ourtant de très jolis moments en dehors des strictes histoires de police mais c'est à chaque fois des scènes dans lesquelles l'esprit du groupe prime sur les histoires personnelles, on retiendra surtout la soirée dans la boîte de nuit ou l'équipe se lâche pour évacuer la tension et la scène de la soirée entre amis chez le personnage interprété par Marina Foïs. Dans le registre plus intime seuls la relation amoureuse tout en non dit entre Karole Rocher et Nicolas Duvauchelle et les très beaux moments entre Fred (Joey Starr) et sa petite fille parviennent à toucher. Le plus horripilant reste sans doute le personnage interprété par Maïwen elle même avec le sentiment parfois bien désagréable que le film tourne un petit peu trop autour de son nombril. La réalisatrice s'octroie d'abord un rôle de témoin assez distant et transparent mais assez vite ,comme si elle craignait de passer au second plan, le film va commencer à tourner autour de son histoire d'amour naissante avec le personnage de Fred, ce qui n'est objectivement pas l'aspect le plus passionnant du film.
Fort heureusement Polisse est aussi un film vraiment formidable dès l'instant qu'il revient à sa véritable raison d'exister. On pourra dire absolument tout ce que l'on veux de Maïwen, de sa grande gueule, de sa prétention, de sa suffisance mais de films en films elle confirme qu'elle est vraiment une formidable et fiévreuse directrice d'acteurs. On se retrouve totalement plonger dans le quotidien de ces flics finalement bien ordinaires avec un soucis constant de toujours rester à hauteur d'hommes et de femmes. Polisse parvient à fasciner et révulser sur la cohorte d'horreurs quotidiennes que doivent traiter ses flics tout en gardant une forme de froide distance qui parfois se fissure comme autant de blessures. Parfois procéduriers, parfois cynique, parfois révoltés, parfois ironiques, parfois maladroit, parfois froid ou rempli de compassions on suit comme autant d'épreuves intimes les interrogatoires de mères indignes ou victimes, de père pédophiles et surtout d'enfants parfois victimes de leur innocence. Maïwen révèle alors sous le regard acéré comme un scalpel de sa caméra les pires horreurs dont peuvent être victimes les enfants. Polisse dresse alors en filigrane le portrait d'une époque entre impunité des puissants, banalisation totalement inconsciente de l'acte sexuel chez les adolescents, combat entre traditions et droit, violence ordinaire et de nombreux autres sujets que la réalisatrice évoque très souvent avec une force frontal et tact mesuré. Impossible d'oublier la scène de l'avortement de cette adolescente violée, les larmes de cette mère (Sandrine Kiberlain magnifique) réalisant les horreurs qu'elle a laissé subir à sa fille ou le terrible témoignage cynique et désabusé de ce père pédophile. Il serait bien trop facile de penser que Polisse se vautre dans le sordide en cataloguant les horreurs que peuvent subir les mineurs, il ne fait que livrer sur deux heures au yeux de tous ce que ces flics vivent au quotidien. Certaines séquences pourront sembler complaisantes dans leur description froide et clinique mais elles ne font que mettre à jour une réalité qui écorche le cœur et les yeux. On est d'abord surpris et souvent choqué par le détachement apparent de ses flics parlant parfois de viols de mineurs comme on parlerait shopping puis on finit par comprendre leur fonctionnement et surtout la carapace qu'ils sont obliger de se construire. On finira même par rire avec eux sur une histoire aussi grotesque que sordide de fellation pour récupérer un portable. L'intégralité de ce qui touche directement au travail de la brigade est absolument parfait en matière de mise en scène comme en matière de direction d'acteurs. Le seul gros bémol reste la séquence assez foireuse durant laquelle la BPM doit épauler une autre brigade pour un flagrant délit, une séquence de pseudo suspens et d'action tellement inutile que l'on se demande ce qu'elle vient foutre dans le film.
Pour Polisse Maïwen s'est entourée comme souvent d'une sacrè bande d'acteurs et d'actrices. Un casting formidable pour une nouvelle fois de très grands moments de comédie. Le casting est absolument parfait à l'exception de deux léger bémol pour moi qui sont Maïwen elle même et Karine Viard que j'ai personnellement trouvée assez insupportable. Bon, j'avoue que je n'ai jamais vraiment accroché sur cette actrice mais elle est de tout le casting la seule qui me semble en faire souvent un peu trop dans le registre du naturel forcé. Pour le reste c'est du tout bon et il faut saluer les très belle prestation de Nicolas Duvauchelle, de la bien trop rare Karole Rocher (Braquo), de la formidable Emmanuelle Berco, sans oublier Frederic Pierrot, Naydra Ayadi, Arnaud Henriet et Marina Foïs bien plus convaincante en flic ici que dans L'immortel. Je sais que c'est un peu facile de citer l'intégralité du casting mais Maïwen a réussit à créer une telle effervescence, une si belle émulsion d'énergie entre ses comédiens qui fait qu'il est difficile d'en ressortir un seul du lot comme lors de l'excellente et bouillante scène du kebab. Difficile de ressortir un nom encore que, comme vous l'aurait remarqué forcément je n'ai pas encore parlé de Joey Starr qui incarne Fred. Pas grand chose à dire si ce n'est que Joey Starr est absolument MONS-TRU-EUX et qu'il bouffe l'écran avec un charisme animal et un naturel qui m'ont laissé vraiment pantois. Dès la première scène dans la voiture de police quand il engueule une adolescente de banlieue pour la faire taire c'est une évidence, Joey Starr est un putain d'acteur. C'est bien simple dès l'instant qu'il est à l'écran le film prend vraiment une autre dimension tellement il est énorme. Il était déjà l'un des seuls atouts du film Le bal des actrices mais là il est vraiment incroyable de magnétisme, de puissance et d'émotion. La scène durant laquelle son personnage prend trop à cœur la séparation d'une mère africaine et de son fils est juste bouleversante d'humanité, de rage, de tristesse et de tendresse mélangés. Ne serait ce que pour lui Polisse mérite vraiment le détour.
Polisse est donc un film bien bancal, pas loin de la perfection dans sa description du quotidien de la BPM et pas loin d'être totalement insupportable sur d'autres aspect. La force du propos, la puissance de certaines séquences, l'émotion et l'humanité qui se dégage du film et la performance de Joey Starr suffisent toutefois à placer Polisse dans la catégorie des très bons films.
Ma note : 07,5/10
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Shadow
de Federico Zampaglione
Italie (2009) Horreur / Fantastique / Let's twist again
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Cela faisait bien longtemps que l'Italie ne nous avait pas offert un peu film d'horreur digne d'intérêt. Le pays de Bava, Fulci, Argento (de son vivant), Soavie, Deoddato signe t-il enfin avec Shadow son grand retour dans le monde joyeux de la tripailles et du sang frais ? La réponse sera un poil mitigée pour moi, le film de Federico Zampaglione étant au bout du compte et en dépit de ses nombreuses qualités une petite déception.
Le film raconte l'histoire d'un soldat fraichement revenu du front de la guerre en Irak qui, pour s'aérer l'esprit, part faire du vélo dans la montagne. Le jeune homme accompagné d'une jeune fille croisée au gré de sa ballade se retrouvent alors traqué par deux chasseurs à la suite d'une altercation dans un petit café. L'homme et ses poursuivants trouvent alors refuge dans une partie haute de la montagne, laquelle semble hantée par une malédiction et le présence du mal.
Shadow commence donc comme un pur et classique survival montagnard avant de glisser vers le fantastique et le torture porn. Le gros soucis dans ce petit exercice critique c'est que tout le film se doit d'être analyser au regard de son twist final qui n'est pas pour une fois qu'un simple artifice narratif mais qui éclaire et redonne une certaine cohérence au film tout entier. Un twist qui donne une vraie dimension dramatique au film de Zampaglione mais que je me garderais bien de révéler même si personnellement j'avais totalement grillé le truc dès le générique de début et que la majorité des fans de films de genre devraient en faire de même sans trop avoi à se casser la tête.
Outre son twist final le film de Federico Zampaglione marque surtout les esprit par la figure fascinante et inquiétante de son méchant. C'est le comédien Nuot Arquint qui incarne cet être décharné, animal et fantomatique à la démarche et au regard particulièrement flippant. Silencieux, sadique, à la fois fascinant et repoussant, le personnage de Mortis s'impose illico comme l'une des figures les plus étranges vu sur un écran depuis longtemps. Une performance et un physique qui font penser à l'immense Doug Jones (Le labyrinthe de Pan, Skin and bones de la série Fear Itself) et qui impose Nuot Arquint comme un effet spécial horrifique à lui tout seul.
Un petit frisson de plaisir va sans doute parcourir l'échine des amateurs d'horreur gothique lors des derniers instant du film durant lequel l'un des personnages explore un sorte de crypte étrange à la lueur d'une simple lanterne. Car si Ferderico Zampaglione ne signe pas le retour en force définitif et incontestable de l'horreur italienne, en revanche il réalise un film très prometteur et porteur d'espoir. On regretteras juste quelques raccourcis idéologiques douteux, en tout cas faciles, comme lorsque au hasard de ses déambulations le héros croise sur les murs du repaire de Mortis des portraits alignés sur un même plan de Hitler, Staline et Georges W Bush. Même si dans le contexte de l'histoire qu'il raconte cette amalgame peut se comprendre il demeure, même si je n'ai aucune affection particulière pour Bush, un peu trop caricaturale.
Shadow est donc une bonne surprise qui devra se juger uniquement à la lecture de son twist final qui remet en perspective les codes et les clichés du film d'horreur utilisés dans sa première partie pour révéler toute la dimension dramatique de cette histoire. En tout cas Federico Zampaglione est d'ores et déjà un réalisateur à suivre...
Ma note : 06,5/10
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Comme le dit la chanson, « Je m'en vais vous parler d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître... » Une sorte de coup de bâton nostalgique, de retour vers ce no mans land étrange entre l'enfance et l'adolescence, vers ces années qui ont forgées au fer rouge d'une passion indéfectible mon amour et ma curiosité pour un certain cinéma. Ma madeleine de Proust à moi je l'ai retrouvé en fouillant les vieux cartons d'un déménagement datant de plus de dix ans que je n'avais jamais pris le temps de réouvrir. Ce petit livre dont l'état accuse le fil des ans et retrouvé comme un Graal perdu fut longtemps une sorte de guide spirituelle et un fidèle compagnon. Ce livre c'est tout simplement le guide Brandt électronique/Vidéo 7/ 83-84 de la vidéocassette. Un petit pavé bleu de plus de 500 pages qui recensait les quelques 5000 films disponibles à la location dans les toutes premières heures des vidéo clubs.
Pour comprendre il faut revenir trente ans en arrière (Pfiouu déjà !) et planter un peu le décor. Il faut surtout savoir qu'à cette époque pour regarder un film il n'existait que deux possibilité; soit aller au cinéma voir l'un des cinq ou six films qui sortaient chaque mercredi (contre 10 à 12 aujourd'hui) ou bien regarder un film parmi les six à dix que proposaient les trois seuls chaînes de télévision de l'époque par semaine. On était donc bien loin de l'offre actuelle qui permet tout simplement l'accès à des milliers de films chaque jours. Entre les centaines de chaînes de télévision, les multiplexes, les plate forme de téléchargement, les vidéo clubs par internet, la VOD, les distributeurs automatiques de films et le peer to peer, on est juste passer en trente ans d'une période à laquelle on regardait tout bêtement ce qu'on avait l'occasion de voir à une époque à laquelle on consomme du film comme du hamburger et du kleenex, un produit cinématographique en remplaçant bien trop vite un autre. Au tout début des années 80, Canal + n'existait même pas encore mais une belle révolution culturelle qui marquera au fer rouge toute une génération y compris de réalisateurs était en marche et elle s'appelait le vidéo club. A cette époque le légendaire slogan de l'éditeur René château vidéo: « Les films que vous ne verrez jamais à la télévision » n'avait pas encore perdu son sens.
J'avais onze ou douze ans lorsque le premier magnétoscope est arrivé dans la famille, c'était un petit peu après la mort de mon père et c'était un cadeau de notre mère à moi et mes six frères et sœurs. C'était un Panasonic qui ressemblait à une sorte de grosse boîte en métal grise argentée bien massive; le chargement des cassettes s'effectuait par le dessus et à la pointe de la technologie on pouvait même se servir d' une magnifique télécommande à fil. Pas encore de prise péritel, les magnétoscope possédait un tuner pour pouvoir retrouver les chaines de télévisions afin de les enregistrer et la transmission des signaux s'effectuait par le cordon d'antenne. Vu le prix exorbitant des premiers films disponibles à la vente et une fonction enregistrement à l'utilité réduite (avec trois chaines de télévision on avait rarement des choix à faire) c'est très vite vers la location que mes frangins plus vieux que moi se tournèrent. A cette époque les vidéo club fleurissaient à chaque coin de rue et on trouvait dans ma ville des films à louer absolument partout comme dans des magasins d'électroménager, dans un sous sol d'un magasin de sport et dans des petite boutiques pas plus grandes que des baraques à frites. A douze ans c'était les plus souvent mes frangins qui choisissaient les films mais je les accompagnais très souvent et parfois j'avais cette immense bonheur, ce privilège incroyable de pouvoir choisir un film. Car la première révolution des vidéo clubs étaient déjà là, dans la possibilité de choisir, de ne plus être dépendant des programmes de télévision et de décider enfin de ce qu'on allait pouvoir regarder. Je ne vais pas me la jouer cinéphage averti depuis la nuit des temps et comme j'étais encore un minot mes gouts cinématographiques se portaient alors plus volontiers vers les comédies, la castagne et les films pour enfants, mais je regardais déjà du coin de l'œil avec ce plaisir exquis de l'interdit les jaquettes de films d'horreur. Je me souviens parfaitement des deux toutes premières locations, c'était On se fait la valise docteur de Peter Bogdanovic pour les plus petits et Cannibal holocaust pour les plus grands avec la VHS bien planqué sur le haut du buffet après le retour à la maison. Durant pas mal de temps j'ai donc surtout bouffer des comédies franchouillardes à base de bidasses en cavale, en vadrouille, dans la mélasse ou au pensionnat, des productions Disney comme Nanou fils de la jungle ou Le fantôme de Barbe noire, les films avec Terence Hill et Bud Spencer (Deux super flics, Attention on va se fâcher ), des films comme Ça va cogner ou Doux dur et dingue car j'adorais cette acteur foutrement charismatique qu'était Clyde le orang-outan. Mais c'était aussi la découverte des Bruce Lee et des films de karatés aux titres improbables comme Kung fu mort express, Soja bambou et karaté ou La vengeance du Lama qui me faisait découvrir sans même le savoir le cinéma de Hong Kong et surtout le plaisir castagner mes frangines.
Pour en revenir à ce fameux petit guide il faut savoir qu'il m'était devenu assez vite indispensable, je cochais frénétiquement d'une croix les films déjà loués que je notais sur une échelle de 4 étoiles, je pointais les films à voir et je m'amusais souvent en ouvrant le guide au hasard à choisir parmi les 20 films présents sur la double page lequel j'aimerais posséder (J'étais encore loin de m'imaginer collectionnant les films). Par tradition familiale ce petit bouquin était tout simplement devenu un incontournable des séjours aux toilettes et pas seulement pour les films X chroniqué entre les pages 427 et 515. Je lisais frénétiquement les résumés des westerns, des policiers, des films d'aventures avec cette sensation d'avoir accès d'un seul coup à toute la face immergé d'un iceberg. On pouvait enfin disposer d'autres choses sur notre écran de télévision que les films du dimanche soir avec De Funes, Pierre Richard et Les charlots..... En le relisant aujourd'hui je redécouvre avec effarement les films que j'ai bouffé à cette époque comme La dernière bourrée à Paris, Ça va pas être triste ou Le jour se lève et les conneries commencent et surtout les notes que j'osais leur mettre. Je construisais tout bêtement mon esprit critique et à chaque nouveau film je pouvais établir une nouvelle échelle de valeurs et de comparaison, j'ai peut être même garder de cette époque cette envie boulimique de toujours tout voir même si c'est devenu quasiment impossible aujourd'hui. Le pire c'est que par simple nostalgie j'aurai presque envie de revoir maintenant ces films français aux titres à rallonge qui le plus souvent n'étaient que des lamentables pantalonnades bien lourdes. Je garde aussi un souvenir trouble et bien plus émouvant de toutes ses comédies italiennes totalement crétines mais dans lesquelles on pouvait voir Edwige Fenech. Arghhhh Edwige Fenech, je crois bien que ce sont mes premiers souvenirs d'émois érotiques d'adolescent. Il faut dire que la jolie demoiselle avait la très bonne habitude d'apparaître souvent toute nue dans ses films ce qui me faisait aimer éperdument des films comme La toubib aux grandes manœuvres, La toubib et les enfoirés, La toubib prend du galon, La flic à la police des mœurs ou La prof connait la musique. La fesse était encore joyeuse, l'émoi était trouble, l'érotisme difficile d'accès, le premier samedi du mois n'existait pas encore et la pornographie n'était pas encore accessible 24H/24 au moins de dix ans d'un simple click de souris.
Les mois passèrent doucement et ma curiosité allait en grandissant surtout que nous avions dénicher un petit vidéo club qui existait sans vitrine ni aucune publicité, bien caché dans un banal appartement d'immeuble. Ce petit vidéo club tenu par des passionnés n'était ouvert que quelques heures par jour, fermé les week-end et offrait une possibilité rare d'avoir accès à deux films gratuit à chaque location. On pouvait donc à chaque fois repartir avoir trois VHS dont deux films issus d'une sélection de titres plus anciens et plus obscurs. Une aubaine pour satisfaire sa curiosité et se frotter à des films et des cinémas différents. Je ne remercierais jamais assez ce vidéo club et la passion formidable de ces gens là, si Bubblegeek existe c'est indirectement mais incontestablement grâce à eux. Ce vidéo club s'appelait Nata vidéo, il fallait payer une adhésion qui consistait à acheter un film et pour nous ce fut Flic ou Voyou avec Belmondo, le film restera d'ailleurs très longtemps le premier et seul film de ma vidéothèque . Ce vidéo club était dans une salle à manger d'appartement, les cassettes étaient posées sur des tables souvent sur la tranche pour gagner de la place,les films qui sortaient étaient tout bêtement notés sur un grand cahier à spirales,on pouvait repartir avec les films dans leurs boitiers avec la jaquette (les grandes boîtes à la tranche arrondie) et surtout à chaque fois que l'on rendait les films on nous demandait toujours en vérifiant que les cassettes étaient bien rembobinées ce que nous en avions penser. Et oui ! Il existait des vidéo clubs dans lesquels on pouvait parler de cinéma, demander des conseils et se gaver d'autres choses que de nouveautés. C'est à cette époque que j'ai eu ma toute première expérience avec les films d'horreurs, mes frères avaient loué Le crocodile de la mort de Tobe Hooper. Après de longues et incessantes tractations avec ma mère j'avais enfin obtenu le droit de regarder le film sous le contrôle avisé des mes grands frères qui devaient m'envoyer illico au lit si le film était trop violent. Je ne craignais objectivement pas grand chose au niveau de la censure de la part des mes frangins et j'ai donc commencer à regarder le film bien tranquillement calé dans le vieux canapé familiale. A peine le générique de début terminé ma maman sort de sa chambre pour aller au toilette et tombe sur la toute première scène du film avec le gros plan de la braguette et la réplique « Je m'appelle Buck et je veux baiser » . Du coup j'ai du aller au lit sans discuter en ayant vu en tout et pour tout deux petites minutes du film. Une frustration intense mais qui ne durera pas très longtemps ma mère me permettant finalement assez vite de me confronter à mes propres limites et angoisses en me laissant regarder autant de films d'horreur que j'en avais envie. Il fallait toutefois que les films ne soient pas trop violent, ni trop effrayant; rétrospectivement c'était un peu comme si j'avais eu le droit de regarder des comédies à conditions qu'elles ne soient pas drôles. Du coup, j'ai commencer à regarder des films d'épouvantes avec ceux de la Hammer comme les Dracula et les Frankenstein. On était bien loin de Tobe Hooper mais finalement sans le savoir ma mère me faisait commencer par des bases solides. Comme une ultime revanche sur la petite histoire j'ai finalement acheté bien plus tard la cassette du film de Tobe Hooper lorsque le vidéo club l'a mise à la vente d'occasion, depuis même si j'ai le DVD et des tonnes de films bien plus intéressants je garde la VHS comme une pièce maîtresse de ma collection et j'ai toujours un léger frisson nostalgique quand j'entends « Je m'appelle Buck et je veux baiser ». J'espère alors secrètement voir sortir ma mère aujourd'hui disparue et l'entendre me dire encore et encore « Non mais c'est quoi ce film ??, Toi tu vas tout de suite au lit !! ». C'est ça toute la magie de l'amour que l'on porte a certains films, pouvoir avoir un frisson d'émotion nostalgique pour un gros plan de braguette.
Voilà ce n'est encore que le début d'une très longue histoire d'amour avec cette bonne vieille VHS, viendront ensuite les premiers films loués avec mon propre argent de poche, l'électrochoc Massacre à la tronçonneuse et la découverte des maîtres de l'horreur, les longues soirées vidéos avec les potes, les premières copies, les premiers films de ma vidéothèque et la naissance d'une passion dévorante jusqu'à la folie... Presque quinze ans jusqu'à la fin d'une époque qui sera marqué par la mort lente et progressive des petits vidéos clubs...
Un petit clin d'oeil amicale et une dédicace spéciale à Soundwave dont le très joli article sur Massacre dans le train fantôme m'a donné envie de reprendre cette article en attente depuis plusieurs mois dans mon ordinateur. Le réveil de la nostalgie VHS m'a fait passer de longues heures devant mon écran pour enfin accoucher de ce texte en trois partie. Merci !
A suivre .....
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