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Par Freddy K le 3 Mai 2012 à 20:59
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La cabane dans les bois ( The cabin in the woods)
de Drew Goddard
USA – 2012 Comédie beaucoup / Horreur trop peu
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Le moins que l'on puisse dire c'est que La cabane dans les bois est un film qui aura su se faire attendre et désirer. Resté dans les placards pendant presque trois ans suite aux problèmes financiers de la MGM, un temps annoncé dans une conversion en 3D le film de Drew Goddard sort donc finalement sur les écrans avec en plus une jolie réputation de petite révolution horrifique. De quoi faire baver d'impatience les fans de films de genre qui il faut bien le dire sont de moins en moins surpris devant la majorité de la production horrifique actuelle. Il reste à savoir si le film de Drew Goddard et Joss Whedon tient finalement toutes ses nombreuses promesses ou si il demeure un pétard mouillé de plus.
La cabane dans les bois raconte l'histoire classique de cinq jeunes amis partis passé un week-end dans une cabane paumée au fond des bois. Après la lecture d'un journal intime trouvé dans la cave ils vont réveiller les esprits d'une famille de zombies dégénérés... Voici en tout cas pour la face visible de l'iceberg.
Avant de commencer cette critique je tiens à signaler aux lecteurs combien il est difficile d'analyser La cabane dans les bois sans en spoiler une partie des secrets. Je voulais tenter de ne pas trop en dire mais il est évident que pour approfondir mon analyse je serais obliger de livrer des pistes et informations que les futurs spectateurs du film préféreront sans doute ignorer. Vous voilà donc clairement avertis, cette critique contient de nombreux gros spoliers.
La toute première chose que l'on doit porter au crédit de La cabane dans les bois est incontestablement son originalité, certes relative, mais Drew Goddard et Joss Wedon proposent un film qui se démarque du tout venant de la production horrifique avec une histoire originale, un concept nouveau, un regard plutôt malin sur le genre en évitant de sombrer dans les facilités de reproduire ce qui marche depuis quelques années. On en viendrait presque déjà à célébrer La cabane dans les bois pour le simple fait de n'être ni un found footage, ni un remake, ni une zombédie, ni un film d'infectés , ni une suite ou prequel pas plus qu'un torture porn; c'est dire à quel point le cinéma horrifique est en manque de renouveau. Pourtant La cabane dans les bois n'est pas non plus un concept totalement neuf puisque restant dans l'esprit d'un film comme Scream ou le moins connu The red hills run red de Dave Parker avec un regard à la fois complice et distanciè sur les clichés inhérent au genre investit. L'originalité vient ici d'un regard extérieur sur les événements avec une mystérieuse entreprise de cols blancs semblant manipuler la réalité et les événements afin de parvenir à ses fins. Une sorte d'organisation secrète jouant avec les éléments d'un théâtre grotesque afin de satisfaire un obscur dessein tout en créant une sorte de film dans le film.
Mais comme tous les films qui s'amusent des clichés La cabane dans les bois cultive le paradoxe de les aligner avec la régularité mécanique d'un métronome. On pouvait espérer que à travers leur scénario Goddard et Whedon surprennent jusque dans la structure du survival forestier servant de base à La cabane dans les bois. Malheureusement il n'en sera rien et à bien des points de vues le film n'est finalement ni pire ni meilleur que bon nombres de productions du même genre. Alors bien évidemment on va me dire que c'est tout à fait normal et même qu'il ne peut pas en être autrement puisque le film joue sur les clichés du genre. Mais voilà, normal ou non, il faut juste savoir que sur l'essentiel La cabane dans les bois est un survival forestier ultra classique et plutôt soft avec son lot de personnages bien têtes à claques, de situations déjà vu milles fois et de jumps scare largement téléphonés. Il est vrai qu'il est bien plus facile de compiler les figures imposés d'un genre avec un sourire de complicité goguenard que d'en réécrire les concepts et d'en renouveler la mythologie. L'originalité , et je ne nie pas qu'elle est de taille, reste ses curieux personnages semblant orienter, manipuler, provoquer les événements afin d'écrire à mesure qu'il se déroule la trame d'un film d'horreur. Un décalage curieux, ludique et amusant dont il est objectivement dans un premier temps assez difficile de définir la finalité. Ce regard parallèle à celui du spectateur sur les événements provoque tout de suite un décalage humoristique et flingue illico tout le potentiel strictement horrifique du film qui déjà n'était pas extraordinaire. Très vite La cabane dans les bois devient une comédie bien plus qu'un pur film de terreur ce qui est déjà pour moi un demi échec pour un film sur-vendu comme le renouveau de l'horreur. Le premier Scream de Wes Craven réussissait à être à la fois par certains aspects une comédie tout en restant et avant toute choses un excellent slasher. Objectivement dans La cabane dans les bois, rien ne fait peur, rien ne met mal à l'aise, rien ne déstabilise les spectateur si ce n'est la curiosité ludique de savoir vers quoi nous conduit le scénario. On s'amuse donc beaucoup devant certaines scènes assez maligne comme lorsque notre mystérieuse entreprise provoque la séquence nichons du film en augmentant la température et diffusant des phéromone et on reste parfois circonspect devant quelques facilités imbéciles comme le gaz qui d'un coup fait changer d'avis comme par magie un personnage entre rester en groupe et se disperser. Les amateurs d'horreur pur et dur et de frissons seront fatalement frustrés tant on a trop souvent la sensation de voir deux vieux digne du muppet show commenter en live un mauvais film d'horreur.
Je dois dire qu'à mesure que le film avançait je me disais que Drew Goddard et Joss Whedon avaient intérêt à me trouver un climax absolument dantesque pour justifier le travail de cette curieuse entreprise. On comprends toutefois assez vite la stricte finalité des choses, la réponse est d'ailleurs déjà présente dans le générique de début, mais on a vraiment envie que le film apporte des réponses claires et pertinentes à nos trop nombreuses interrogations. Si la simple finalité est de trucider cinq adolescents en sacrifice, pourquoi toute cette mise en scène ?? Pourquoi cette compétition mondiale dans laquelle les règles du sacrifice en lui même semblent changer ? La finalité des films d'horreur, comme le laisse supposer le film, est donc de trucider dans un rituel accepté par les spectateurs sous couvert de divertissement des adolescents afin de satisfaire les puissance maléfiques du monde ? Il faudra juste dire à Joss Wedon et Drew Goddard que personne n'est dupe sur le fait que les personnages des films d'horreurs sont des acteurs qui reviennent régulièrement dans d'autres films. Ou alors, les deux scénaristes suggèrent que les adolescents sont tellement gavés de clichés de films d'horreur qu'ils vont les reproduire dans une situation extrême comme des imbéciles, les films d'horreur rendraient ils cons (??). D'ailleurs est ce un film en train de se tourner comme une télé réalité ou bien une réalité destinée à aucune diffusion ?? Le concept de La cabane dans les bois est certes ludique, original et malin mas il se prend aussi volontiers les pieds dans le tapis dans ses errances et ses contradictions. Pourtant le film effleure aussi du doigt des thématiques passionnantes comme notre regard distanciè sur la mort de personnes sous couvert de convention à un genre et une fiction...
Une fois acceptée l'idée générale du film on pourra alors se délecter d'un dernier acte assez bordélique mais particulièrement jouissif pour les fans de films d'horreur et de série B qui verront débouler à l'écran un bestiaire assez spectaculaire et diversifié. On s'amusera alors des très nombreuses références cinématographiques et littéraires présente à l'écran et on célébrera enfin l'orgie horrifique que nous propose le film tout en se disant qu'elle arrive bien trop tard. On notera toutefois que même en dehors du contexte d'un survival les personnages restent toujours des têtes à claques sans substances et que ce n'est pas le nihilisme de leur décision final qui va les transformer en figures inoubliables du genre contrairement à tant d'autres avant eux. Whedon et Goddard se plantent aussi un peu sur le choix de leur guest star final car outre le fait que Paul de Greg Mottola leur ai déjà piquè l'idée (même si historiquement La cabane dans les bois a été fait avant) on se dit que les deux compères aurait pu trouver une actrice autrement plus iconique et pertinente pour les fans de cinéma horrifique
La cabane dans les bois est donc un petite déception pour la simple raison que tout ce que le film remplit brillamment sur le contrat de la comédie se fait au détriment de l'horreur. Si le spectacle reste à la fois ludique, original, malin et bourré de bonnes intentions il n'est en rien un grand film d'horreur dans le sens ou je l'espérais. La cabane dans les bois est certes l'un des films de genre les plus originaux de ses dernières années mais j'aurai préféré de très qu'il soit l'un des plus intense et des plus effrayant. J'attends donc toujours mon grand film d'horreur mais il viendra un jour et j'espère que contrairement à celui ci il fera très mal, très peur et renouvellera vraiment le genre en l'investissant de manière frontalr et non détournée.
Ma note 07/10
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Par Freddy K le 8 Avril 2012 à 18:45
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[Rec]3 Genesis
de Paco Plaza
Espagne (2012) Horreur / Comédie / Un mariage et 200 enterrements
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Après un second volet ,certes décevant mais tout à fait respectable, la saga Rec se poursuit donc avec deux nouveaux films. Avant le Rec Apocalypse de Jaume Balaguero prévu pour l'année prochaine et qui sera une suite direct des deux premiers, voici donc que débarque sur les écrans [Rec]3 Genesis, qui raconte des événements antérieurs à la contamination de l'immeuble. Les fans de la saga pouvaient donc se réjouir fortement de voir les deux réalisateurs se dissocier pour explorer d'un coté les origines du mal et de l'autre ses conséquences apocalyptique...
[Rec]3 se déroule donc un peu avant les événements de [Rec] , ou plutôt de manière simultanée. On suit ici le mariage de Koldo et Clara dans une magnifique maison de campagne avec des centaines d'amis et invités. Le mariage va très vite tourner au cauchemar lorsque un oncle vétérinaire mordus récemment par un chien se transforme en bête sanguinaire contaminant peu à peu tous les convives.
[Rec]3 était sur le papier pétris des meilleurs intentions avec ce désir de raconter la genèse de l'infection tout en se démarquant du style caméra subjective pour ne pas resservir éternellement les mêmes images aux spectateurs (Les producteurs de Paranormal activity devraient fortement s'inspirer de cette démarche). Malheureusement le film de Paco Plaza se démarque tellement des deux premiers films qu'il ressemble bien plus à un spin off parodique et récréatif qu'à un film s'inscrivant totalement dans la cohérence de la franchise. Autant je cautionne à 100% les intentions, autant je ne peux que me résigner à une moue des plus dubitative devant le résultat. [Rec]3 est une comédie romantico horrifique classique, pas totalement foireuse mais qui objectivement n'apporte strictement rien à la saga initiée en 2008. Le film ne raconte strictement rien des origines de l'épidémie, se rattache maladroitement et artificiellement aux deux autres films et ne propose quasiment rien de ce que le spectateur est en droit d'attendre d'un [Rec]. La marge semble pourtant assez énorme entre le fait de ne pas recopier ad vitam aeternam la même recette et partir tellement à l'ouest que le film semble ne plus appartenir à la saga dans laquelle il devrait s'inscrire. L'idée de faire de ce [Rec]3 Genesis une comédie romantique était déjà un poil saugrenue mais Paco Plaza ne semble même pas prendre la peine d'en faire une bonne... On a presque l'impression d'assister à une démolition en règle de l'identité des deux films précédents pour revenir à du pur divertissement horrifique aussi léger que futile.
[Rec]3 Genesis commence déjà de manière assez bancal. On suit le mariage de Clara et Koldo filmée par différents invités et l'on retrouve donc le coté vue subjective et images bruts propre à la saga. Un long prologue de presque un quart d'heure (pour un film de 80 minutes) qui va couvrir les événements et les débuts de l'infection dans l'assistance. Ensuite le jeune marié et personnage principal du film ne comprenant pas que l'un des convives puisse continuer de filmer lui arrachera la caméra des mains et la piétinera violemment au sol. Une scène qui fonctionne relativement bien avec cette idée de donner un violent coup de pied à cette satanée vue subjective pour passer à autre chose en revenant à une forme plus classique de cinéma. Après on peut aussi se demander pourquoi Paco Plaza perd un gros quart d'heure de film avec une mécanique qu'il va ensuite fouler au pied. C'est d'autant plus inutile que cette longue exposition ne sert objectivement pas à grand chose si ce n'est à introduire le retour vers un cinéma plus traditionnel en assurant un lien graphique avec les deux autres films. Personnellement j'aurai vraiment préféré que le film commence directement de manière classique et que ce long prologue serve à caractériser et introduire un peu mieux les personnages de Clara et Koldo auxquels il est bien difficile de s'attacher alors que leur histoire d'amour est au centre du film.
[Rec]3 ressemble donc bien à une digression ludique des univers de [Rec] et [Rec]2 qu'à une véritable suite. Hormis deux ou trois éléments presque rien ne rapproche vraiment le film de Paco Plaza de l'univers particulier des [Rec]. Mais le plus décevant c'est que même en regardant le film avec une certaine neutralité vis à vis de son statut de prequel on constate avec dépit (voir agacement) que rien ne fonctionne vraiment. La romance entre Koldo et Clara a bien du mal à toucher les spectateurs du fait de son manque d'exposition et de profondeur, l'humour du film à base de déguisements tombe le plus souvent à plat et niveau trouillomètre on frise le zéro absolu. On sent venir les effets et les sursauts à des kilomètres et de toute évidence le film se range plus du coté du gore rigolo que du frisson et du malaise. Tout semble au final un poil artificiel et vain du type déguisé en Bob l'éponge en passant par Koldo qui s'équipe d'une armure ou la mariée trouvant une tronçonneuse et découpant sa robe pour aller jouer les walkirie en jarretière. On pourra toujours se contenter de quelques effets gore bien méchant comme un coup de mixer dans les gencives mais il faut tristement reconnaître que [Rec]3 est un film des plus moyen qui n'offre pas grand chose de réjouissant aux spectateurs. Les deux seules bonnes petites idées du film comme les infectés reflétant des démons dans les miroirs et le fait qu'ils s'immobilisent à la lecture de la bible sont balancées comme ça au milieu du film sans explications ne répercutions. Pas suffisamment ancré dans la saga, trop sage au niveau gore, trop poussif dans son humour, pas assez profond dans ses enjeux dramatiques et romantiques.... La liste est malheureusement bien longue et le très beau final conjuguant enfin horreur, amour et drame arrive à peine à masquer l'étendu du naufrage.
Volonté de surfer sur la mode des zombédies ? Désir de totalement s'affranchir des deux premiers films ? Volonté de proposer une face plus ludique et positive de l'univers [Rec] ? ... J'avoue que j'ai un peu de mal à comprendre totalement la démarche de Paco Plaza pour se troisième film. Si [Rec]3 reste un divertissement horrifique tout à fait regardable il n'en demeure pas moins et dans la perspective global de la saga aussi dispensable que décevant.
Ma note 05/10
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Par Freddy K le 14 Mars 2012 à 19:31
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Le territoire des loups (The Grey)
de Joe Carnahan
USA (2012) Aventures / Survival intime
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Après le gros blockbuster crétin L'agence tous risques le réalisateur Joe Carnahan revient sur les écrans avec un film au budget plus modeste, à la dimension plus humaine et certainement plus intime. Le territoire des loups n'aurait pu être qu'un survival de plus (Wilderness version loup) mais en choisissant de traiter son film comme une lente marche funèbre le réalisateur de Narc transforme un récit , somme toute assez basique, en un puissant requiem dramatique.
Le territoire des loups suit l'aventure extrême de sept survivants d'un crash aérien qui se retrouvent perdus dans l'immensité du grand nord. Ils vont devoir faire face à une nature difficile, des conditions climatiques extrême et surtout tenter de survivre à une meute de loups bien décidée à protéger son territoire.
Dès les premiers instant il est parfaitement clair que Le territoire des loups ne sera pas un simple survival entre des hommes et des loups. Quelques minutes suffisent à Joe Carnahan pour décrire un univers masculin un peu minable, à la fois abrupt et désespéré fait de beuveries et de bagarres. Quand au héros du film il est immédiatement montré comme dépressif et suicidaire vivant tant bien que mal avec le poids de la disparition de sa femme. Ca ne respire pas vraiment la joie de vivre et dès les premières minutes, comme les loups le feront ensuite, le spectateur peut ressentir la peur et la mort qui englobe non pas des héros mais des hommes bien ordinaires vivant par habitude. Le territoire des loups traite finalement bien moins des bêtes sauvages que des hommes qui y seront confrontés. Tant pis donc pour celles et ceux qui espéraient le contraire, mais les loups du film ne sont au bout du compte qu'un élément certes important, mais perdu parmi tant d'autres.
Le territoire des loups possède tout à la fois le souffle d'un grand film d'aventures, la tension d'un pur survival et la densité d'un requiem. Une grande aventure humaine qui commence par un crash d'avion vraiment spectaculaire vécu et filmé de l'intérieur du cockpit avec un sacré sens de l'immersion. Ensuite une grosse poignée de survivant ( une poignée étant trop petit pour sept individus) va se retrouver confrontée à la nature dans ce qu'elle possède de plus pur et de plus dangereux. Entre des conditions climatiques extrêmes, un espace vierge de toute civilisation et un retour à l'état de simple proie sur l'échelle animale, les hommes vont revenir à un état quasiment primitif. Joe Carnahan filme alors avec ampleur des personnages perdus dans un cadre désespérément blanc et montre une nature à la fois magnifique et hostile. Une simple marche devient alors une expédition et le film réserve son lot de magnifiques moments de tension comme lors de la traversée au dessus de la rivière. Mais les instants durant lesquelles la tension touche à son paroxysme concernent bien évidemment les loups, pas spécialement lorsqu'ils sont à l'écran mais surtout lorsque leur présence menaçante hante l'espace. Impossible d'oublier la lueur de leur yeux dans la nuit, leurs apparitions furtives et surtout leurs souffles et leurs hurlements dans la nuit. Si leurs attaques sont particulièrement furieuse, brutales et soudaines (sursaut quasiment garanti), je reste bien moins convaincu par les confrontations direct que par la peur de les voir arriver. Un sentiment d'autant plus fort que je ne suis pas particulièrement fan de la façon frénétique et illisible avec laquelle Joe Carnahan filme les confrontations direct entre les hommes et les loups. En revanche j'adore ce sentiment d'insécurité, cette tension de la mort qui rôde, ce hurlement de douleur qui crève le silence, ce souffle de la bête qui annonce le dernier pour l'homme et ce danger pouvant débouler de partout.
Mais l'aspect qui me touche le plus dans Le territoire des loups est incontestablement sa dimension humaine et cette confrontation de sept types à l'idée et l'acceptation de la mort. Le film de Joe Carnahan sonde à travers les destins de ses sept personnages des questions existentielles qui vont bien plus loin que « putain comment je vais péter la gueule au loup ?». Les sept personnages qui peuvent dans un premier temps être perçus comme des caricatures sont aussi l'expression de différents choix de vie. On a un peu le gros dur, le rigolo, les responsable, le réservé, le père de famille, le protecteur et finalement peut être que tous réunis ne sont que l'expression brouillonne de ce qu'est un homme globalement. Et cet homme va tout simplement se retrouver confronter jusqu'à l'absurde à sa triste condition se limitant à comment je dois vivre en attendant la fin, quelles sont les choses qui méritent que je me battent encore, dois je accepter de souffrir encore alors que la fin est joué d'avance ? Les hommes du Territoire des loups ne se retrouvent pas face à des loups mais tout simplement face à eux mêmes et toute l'apparente absurdité de la vie capable d'en faire à la fois des survivants miraculés et des morts en attente . John Ottway ( Liam Neeson) aura beau demander le secours de dieu, l'homme reste un animal désespérément seul face à son destin capricieux, face à ses choix, perdu dans l'immensité d'un univers qu'il ne pourra apprivoiser et inéluctablement victime au bout du compte. Dès lors comment apprivoiser cette idée de la mort, comment la rendre plus douce, comment simplement l'accepter ? Le territoire des loups est une marche funèbre dans laquelle l'humain se retrouve tout simplement contraint par la nature à l'acceptation de son triste sort. Le film de Joe Carnahan possède une scène que je trouve absolument magnifique et qui est le moment ou Diaz coupe la tête du loup et la jette par terre comme un affront aux loups (un détournement d'une des scènes les plus cliché du survival). Les survivants viennent alors de triompher du sort, ils célèbrent cet instant en mangeant et s'amusant, l'espoir semble renaître un peu. Et là après un court silence arrive un hurlement qui glace le sang, le souffle des loups fait naître une buée à l'orée du bois et le visage fermé les hommes comprennent que la mort est toujours là et qu'elle s'amuse de leurs vains espoirs. Personnellement j'en avais la chair de poule.... Le final du film m'achèvera totalement lorsque John Ottway étalera soigneusement devant lui ce qu'il reste de toutes ses vies disparues et regardera les yeux embués les images des bonheurs perdus avant de se battre une dernière fois contre la mort. On a tellement bouffé du survival dans lesquelles les hommes devaient systématiquement redevenir des bêtes sauvages pour survivre que c'est magnifique de voir des personnages devenir de plus en plus humain à mesure que le récit avance.
Le territoire des loups est un grand film qui renoue avec cette traditions des grandes œuvres des années soixante dix dans lesquels les éléments les plus spectaculaires d'une histoire n'étaient que des révélateurs des tourments de l'âme des hommes. Après avoir vu tellement de films vide de sens pour lesquels le spectacle était une fin en soit, ça fait vraiment plaisir de voir un film dans lequel les personnages sont à ce point au centre de tout.
Ma note 07,5/10
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Par Freddy K le 9 Février 2012 à 12:52
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Millenium, Les hommes qui n'aimaient pas les femmes
(The girl with the dragon tatoo)
de David Fincher
USA/Suède/Allemagne (2012) – Thriller / Suspens Ikea
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A peine deux ans après le Millenium de Niels Arden Oplev, Hollywood s'empare comme souvent du phénomène et met en chantier un énième remake aux couleurs presque locales. La petite différence avec ce type de projet généralement assez douteux reste la présence de l'un des meilleurs réalisateurs actuellement en exercice à la barre du projet en la personne de David Fincher. Il convient aussi de ne pas oublier le fait que avant d'être un film Millenium reste un roman pouvant inspirer plusieurs adaptations. Impossible toutefois de totalement oublier le film de Niels Arden Oplev et de ne pas se laisser tenter par le petit jeu de la comparaison avec le film de Fincher ....
Millenium c'est l'histoire de Mikael Blomkvist un journaliste mis sur la touche à la suite d'un procès en diffamation perdu. L'homme accepte alors d'enquêter pour le compte d'un riche industrielle sur la mystérieuse disparition de sa nièce survenue presque quarante ans plus tôt. Mikael engage alors comme assistante une jeune femme marginale et rebelle mais véritable crack en informatique dont l'esprit d'analyse et de synthèse dépasse l'ordinaire. Ensemble ils vont tenter de mettre à jour une vérité enfouit depuis près d'un demi siècle...
La première chose absolument évidente qui saute aux yeux à la vision de ce nouveau Millenium c'est la qualité de mise en scène de David Fincher qui enfonce sans trop forcer l'esthétique télévisuelle et le rythme assez mou du film de Niels Arden Oplev. L'enquête dont nous connaissons déjà pourtant l'issu et la mécanique redevient assez passionnante sous la caméra de Fincher qui donne au récit une densité et un suspens qui objectivement faisait parfois défaut au film suédois. Un sacré paradoxe donc et un sacré tour de force aussi de la part de Fincher de rendre presque plus intéressant que dans le film d'origine un récit dont on connait pourtant déjà la fin. David Fincher installe un véritable climat de tension et de malaise parfaitement soutenu par un formidable sound design et la musique monstrueusement stressante de Trent Renzor (Lost Highway) et Atticus Ross. Le simple bruit d'un courant d'air dans l'immense maison froide et désincarné de Martin Vanger devient par exemple une source de malaise et d'inconfort. David Fincher a également l'excellente idée de ne pas délocaliser l'action et de garder ainsi le rythme sec et un peu engourdit par le froid de l'intrigue. On pouvait pourtant craindre le pire après un générique de début, certes absolument magnifique, mais un poil à coté de la plaque dans son esthétique trop tape à l'œil entre clip et publicité. Si le Millenium original semble fatalement beaucoup plus ancrée dans une esthétique et un rythme typiquement nordique, le film de Fincher a le très bon goût de ne jamais céder à une surenchère d'effets devenus les marques de fabrique systématique des thriller et psychokiller américains. David Fincher dans une mise en images finalement assez classique parvient à donner à cette enquête toute l'intensité dont elle a besoin. Le réalisateur de Seven et Fight Club nous livre toutefois deux trois moments de purs mise en scènes aux images particulièrement marquante comme la vengeance sauvage de Lisbeth ou la poursuite finale.
Au niveau du casting le film opère quasiment un sans fautes confirmant que Fincher est autant un formidable directeur d'acteurs qu'un faiseur d'images. Daniel Craig incarne un Mikael Blomkvist vraiment charismatique, charmeur et pugnace qui parvient sans peine à faire oublier le pourtant formidable Michael Nyqvist de la version originale. Les seconds rôles sont tout aussi convaincant même si l'identification aux personnages étaient plus facile dans la version suédoise du fait de visages souvent bien moins connus que ceux de Christopher plummer, Robin Wright ou Stellan Skarsgard. Il reste ensuite le cas Rooney Mara qui incarne en toute objectivité une formidable Lisbeth Salander mais qui pour moi ne parvient jamais à faire totalement oublier l'extraordinaire présence de Noomi Rapace dans le film de Oplev. C'est peut être le simple fait d'avoir associer en tout premier le physique et le visage du personnage à celui de la comédienne suédoise mais pour moi Lisbeth reste Noomi Rapace. J'aime l'aspect plus monolithique et abrupt de la Lisbeth du film original et bien moins la fragilité sous la carapace de la femme amoureuse de Blomkvist dans le film de Fincher. Encore une fois cela n'entame en rien les qualités de Rooney Mara et la force de son interprétation mais ma préférence va incontestablement vers le charisme naturel de Noomi Rapace.
Pour le reste le Millenium de Fincher comporte pour moi les mêmes qualités et les mêmes défauts que celui de Niels Aden Oplev avec essentiellement cette fin à rallonge qui n'en finit plus de finir. Pour moi le film se termine assez clairement après la résolution complète de l'enquête et la transformation de Lisbeth en super agent secret détournant des fonds pour sauver la réputation de journaliste de Blomkvist me laisse totalement de marbre pour ne pas dire plus. J'ai également une sensation, bien plus qu'une véritable certitude, que le film de Oplev possédait une ambiance un peu plus trouble et glauque que dans le film de Fincher notamment lors de la visite au vieux nazi de la famille. Assez bizarrement je trouves également que l'affrontement finale entre Blomkvist et le tueur était plus intense dans le film suédois, c'est étrange mais la galerie d'outil oranges accrochés au mur façon Hostel et l'utilisation incongrue du Orinoco flow de Enya m'ont fait bien plus sourire que frissonner.
Au final Millenium est incontestablement un très bon film et un excellent remake qui par la simple intensité de la mise en scène de Fincher permet de dépasser un poil son modèle suédois. Après l'écart reste pour moi suffisamment mince pour ne pas faire du film de Fincher une référence absolue. Le fait d'avoir découvert les personnages et l'intrigue dans le contexte strictement suédois du film de Niels Aden Oplev a sans doute un peu biaiser mon regard sur le film de Fincher et puis c'est toujours difficile de totalement adhérer à un thriller dont on connait déjà toute la construction et la fin. Si j'osais, je dirais presque que ce Millenium n'est qu'un bon remake inutile de plus....
Les notes:
Millenium version Niels Aden Oplev 07/10
Millenium version David Fincher 08/10
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Par Freddy K le 15 Janvier 2012 à 11:06
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Hugo Cabret
de Martin Scorsese
USA (2011) – Aventures / Comédie dramatique / Conte
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Bizarrement je n'étais pas spécialement attiré par ce nouveau film de Martin Scorsese et son histoire d'orphelin à la Dickens. La bande annonce laissait entrevoir la perspective d'un gros film familiale et peu mièvre dans lequel la patte du réalisateur de Taxi Driver, Les affranchis, Casino ou Gangs of New-York semblait totalement s'être diluée dans des contraintes grand public. Il restait juste la curiosité de voir ce que cet immense réalisateur allait faire avec la 3D relief et l'intérêt pour l'hommage à Georges Mélies.
Hugo Cabret est un orphelin de douze ans qui vit dans les entrailles d'une gare dont il remonte régulièrement le mécanisme des horloges. Il ne lui reste de son père qu'un mystérieux automate qu'il tente vainement de faire fonctionner. Sa rencontre avec un vieux marchand de jouet et une jeune fille va alors bouleverser sa vie et lui permettre de trouver sa place dans la monde.
Hugo Cabret est bel et bien une petit merveille qui sans être dénué de défauts permet à Scorsese de rendre un superbe hommage à la magie du cinéma et plus particulièrement à ses pionniers et précurseurs comme les frères Lumière et bien évidemment Mélies. On regrettera juste un peu que le cœur du film et ce vibrant message d'amour de Scorsese à la magie du cinéma arrive un peu trop tard dans le récit après une première partie, certes brillante, mais un peu trop longue autour de l'automate. Les intrigues secondaires et petites histoires qui gravitent autour du film ne sont pas non plus vraiment passionnantes que ce soit l'histoire d'amour entre le policier de la gare et la fleuriste ou celle entre le gros monsieur et la dame avec son chien. Ce serait fortement exagérer de parler d'ennui mais le film laisse tout de même le sentiment de perdre beaucoup de temps à des choses bien moins captivante que ce qui fait pourtant son essence et sa raison d'être. On ressort juste de Hugo Cabret avec le regret que Sorsese n'est pas encore plus centré son attention et son récit sur les pionniers du cinéma puisque c'est de loin l'aspect le plus fascinant et brillant de son film.
Car Hugo Cabret est un film qui transpire de l'amour du cinéma et de tous ceux qui consacrent leurs vies à tenter de faire rêver le monde. Dés l'instant que Sorsese aborde les thématiques du cinéma, de ses créateurs, de l'imaginaire, Hugo Cabret devient absolument génial, intense et émouvant. Sur l'écran se télescope et se fondent des images que plus d'un siècle sépare avec pourtant une idée, une envie qui n'a pas changée depuis plus de cent ans, faire vibrer, rire, émouvoir et rêver les spectateurs. Il est toujours bon de voir et revoir sur l'immense toile blanche de l'écran d'un mulptiplex gavé de blockbusters bruyant et synthétiques les visages de Charlie Chaplin, Buster Keaton, Harold Lloyd, Louise Brooks et les images de Melies. Les plus beaux moments du film de Scorsese sont incontestablement ceux ou le réalisateur reprend les images de Melies avec la technologie actuelle, il y-a alors un je ne sais quoi de fascinant et émouvant à voir des instantanés des films de Georges Melies avec des couleurs étincelantes et en relief. La folie, la poésie et la créativité de Melies semblent alors totalement intemporelle et assez étrangement ces images vieilles de plus de cent ans sont plus fascinantes que celles de Scorsese lui même. L'image emblématique de l'œuvre de Melies avec ce visage de lune avec une fusée plantée dans l'œil demeure assez paradoxalement plus spectaculaire, inventive que le pourtant spectaculaire déraillement du train filmé par Scorsese. Comme si nous avions perdu en émerveillement et en magie tout ce que le cinéma nous a fait gagner en matière de réalisme avec les effets spéciaux numériques. Au détour d'une scène Martin Scorsese montre de manière symbolique la dématérialisation du cinéma lorsque Melies brûle ses décors, ses costumes et les autres éléments de ses film.... Pourtant les moments les plus émouvants du film prennent souvent corps par l'objet comme les feuilles de croquis qui s'envolent, le bruit du projecteur, les décors en carton, les livres.
A travers le regard de ce gamin orphelin fasciné par le septième art et qui va finir par trouver sa place dans les rouages du monde il est évident que Martin Scorsese parle de sa propre enfance et de sa passion encyclopédique pour le cinéma. C'est le jeune Asa Butterfield qui incarne Hugo Cabret et le comédien en herbe s'en sort plutôt bien tenant la distance face à un sacré casting réunissant Ben Kingsley, Chloe Grace Moretz (Hit girl forever), Sacha Baron « Borat » Coen, Jude Law, Ray Winstone, Helen McCrory et dans un rôle bien trops secondaire l'immense et légendaire Christopher Lee. Hugo Cabret est un très joli conte de noël qui devrait plaire aux plus jeunes pour ses aspects de film d'aventures et son humour, séduire les plus grands par sa richesse et sa beauté et fasciné les plus cinéphiles pour les nombreuses thématiques passionnantes qu'il aborde à travers ses références. Martin Scorsese multiplie les clin d'œil littéraires et cinématographiques à Dickens, Jules Verne, Stevenson mais aussi Chaplin ou Keaton qui vont trouver directement écho dans le récit du film. On pourra par exemple s'amuser à trouver les nombreuses correspondances entres les extraits de vieux films que Sorsese utilise et les images de Hugo Cabret de la figure de l'orphelin reprise par un extrait de The kid à la scène de l'horloge faisant référence à Harrold Lloyd en passant par le chef de gare accroché au train comme Buster Keaton dans Le mécano de la général ou encore le déraillement du train tentant de faire autant d'effet que la simple arrivée d'un autre train en gare de la Ciotat plus de 110 ans plus tôt.
Et pour terminer comment ne pas saluer la manière à la fois inventive, poétique, immersive et drôle avec laquelle Martin Scorsese utilise la 3D. Même si cela semble une vérité de La Palice Hugo Cabret confirme que le relief devient un formidable élément narratif dès l'instant qu'il se retrouve au service d'un grand réalisateur et non d'un producteur l'utilisant comme un plus marketing. Dès la première scène et son formidable traveling avant nous plongeant au cœur de la gare Scorsese utilise la 3D avec plus d'efficacité et d'intelligence que bon nombres de films avant lui. Les séquences dans les rouages des machineries des horloges sont extraordinaire, tout comme les visions de Paris sous la neige ou encore les images directement issus de l'imaginaire de Melies trouvant ici une toute nouvelle dimension. Scorses utilise même la 3D comme un pur élément de comédie lorsque la trogne de Sacha Baron Coen semble sortir de l'écran et envahir la salle à mesure qu'il s'approche pour réprimander Hugo Cabret. C'est bien simple Hugo Cabret se place illico comme l'une des plus belles expériences 3d avec Avatar, Tintin et Le drôle de noël de Scroodge
Hugo Cabret est donc un formidable conte de noël, un grand divertissement familiale, intelligent et graphiquemnt magnifique. Le film est aussi ,et peut être même surtout, le formidable hommage d'un immense cinéaste à la passion des artisans su septième art et des des faiseurs de rêves.
Ma note : 09/10
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